ADRIEN BISSAVOINE. – Mais voici le professeur qui s'en vient doucement, sans papiers, habitué qu'il est à parler de source, comme le Général de Gaulle ! On rit parce qu'il tient dans les mains un petit oiseau empaillé. Je me trompe, peut‑être, mais j'ai idée que c'est un merlechat… [...] Le professeur le pose devant lui sur la table [...] Je lui laisse la parole.
ALEXIS PATAGOS. – [...] Mesdames et Messieurs, [...] regardez bien. Je prends ma craie, je trace un lettre… Qu'est-ce que c'est ?
UNE VOIX DE FEMME. – Vous nous donnez déjà un zéro ?
ALEXIS PATAGOS. – J'ai dit une lettre, pas un chiffre.
La MÊME VOIX, dans un silence. – Hé ben, alors, c'est un O.
ALEXIS PATAGOS. – C'est un o, en effet. Et maintenant, devant cet o, je trace une autre lettre. Que lisez‑vous ?
QUATRE OU CINQ VOIX. – ZO
ALEXIS PATAGOS. – Parfait ! Z et O, ZO ! Comme zo-o, comme zo-na, comme zo-diaque. Nous avons appris ça à la maternelle, chez les sœurs. C'est très important, vous allez le voir. Mais continuons. Dans l'autre coin du tableau, je trace un A. Devant l'A, j'écris un W. Ce qui fait WA, n'est-ce pas ? WA, comme wapiti, notre grand cerf canadien. WA, comme wawaron, notre grenouille géante. [...] Nous sommes bien d'accord ?
LA SALLE QUI S'ÉCHAUFFE. – Oui ! [...]
ALEXIS PATAGOS. – Bravo ! Mais alors, je vous le demande…
ADRIEN BISSAVOINE, commentant. – Le professeur Patagos vient de saisir le merle‑chat ; il le brandit à bout de bras.
ALEXIS PATAGOS. – … Oui, je vous le demande, si WA s'écrit W-A et si ZO s'écrit bien Z-O, comment se fait-il que le nom de ce volatile s'écrive O-I-S-E-A-U… et non W-A-Z-O ?
ADRIEN BISSAVOINE. – Le professeur Patagos vient de reposer l'oiseau. Il s'assied. Il observe la salle. Je ne vous le cacherai pas : il y a de l'étonnement dans l'air.