Au mois de novembre 2018, un gigantesque incendie, surnommé « Camp Fire » a dévasté la ville de Paradise en Californie et fait 85 morts.
Le changement climatique est désormais omniprésent à San Francisco, une ville où le grand air (« outdoors ») s'engouffre indoors dans les maisons post-victoriennes qui sont souvent construites autour de patios intérieurs. La côte est grignotée. Sur Ocean Beach, les bulldozers sont obligés de remonter le sable tous les deux ans. Les digues se fissurent. Le 6 novembre, les électeurs ont approuvé à 82 % un emprunt pour remonter le « sea wall », le mur de ciment qui protège l'Embarcadero, le point de départ des ferries qui traversent la baie. Pour Faith Kearns, une spécialiste des catastrophes naturelles à l'université de Californie, les feux sont devenus « un problème urgent de sécurité et de santé publique ».
Dans une ville très attachée à sa qualité de vie, les incendies ont conduit à une certaine introspection. Tout a été passé au crible : la « mauvaise gestion » des forêts — monomanie de Donald Trump —, l'insouciance des compagnies d'électricité, l'insuffisance des routes d'évacuation et du système d'alerte à Paradise, la localité dévastée par le Camp Fire.
Et le modèle californien lui-même, comme si les habitants réalisaient à quel point il est menacé par la croissance. En vingt ans, la population de l'État a été multipliée par deux. La construction de logements n'a pas suivi, sous la pression notamment des écologistes et des riverains hostiles au développement urbain. Les habitants à revenus modestes s'installent de plus en plus loin, dans les zones de transition entre nature et urbanisation, cette « interface » qui était censée servir de tampon en cas d'incendie.