Le détroit de Malacca est un axe majeur de la navigation internationale. Situé au croisement de l'océan Indien et du Pacifique, carrefour des routes commerciales vers la mer de Chine méridionale et l'Australie, il représente un enjeu économique et militaire majeur à l'échelle mondiale. Il abrite des ports à conteneurs d'importance, dont le deuxième mondial, celui de Singapour. Sa position privilégiée en fait une des principales routes d'acheminement des hydrocarbures vers l'Asie depuis le golfe Arabo-Persique.

Le détroit est donc vital pour l'économie de pays qui dépendent largement du détroit pour leurs exportations (Chine) et leurs importations (Japon). Mais ce détroit relève également d'un intérêt militaire majeur pour de nombreux acteurs internationaux, dont les logiques sont parfois concurrentielles. La Chine cherche à étendre son influence en direction de l'océan Indien afin de sécuriser ses routes maritimes commerciales, tandis que le détroit reste un point névralgique militaire majeur pour l'Inde. Les États-Unis voient un intérêt majeur dans la lutte contre le terrorisme.

Ce détroit est au cœur des stratégies géopolitiques régionales. Les problèmes d'engorgement et de sécurité dans le détroit de Malacca ont une incidence particulière sur les acteurs régionaux. Sous régime de « passage en transit » depuis la conférence de Montego Bay en 1982, Malacca est en effet une mer intérieure, un espace frontalier entre quatre États (Singapour, l'Indonésie, la Malaisie et la Thaïlande).

Ces États ont développé une gestion commune des infrastructures, et s'investissent dans la sécurité du détroit confronté au risque de piraterie maritime. Des patrouilles coordonnées ont été instaurées et un centre régional de piraterie (CRP), antenne du Bureau maritime international, a été créé en 1992 à Kuala Lumpur. Ces initiatives reflètent la volonté des acteurs régionaux de limiter l'interventionnisme de la communauté internationale. Cependant, ces projets traduisent également les tensions entre ces mêmes acteurs, comme en témoigne le projet abandonné par la Thaïlande du canal de Kra, route alternative permettant de désengorger le détroit, que la Chine cherche actuellement à reprendre.