Français 1re

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Repères - Histoire
Partie 1 • Le roman et le récit du Moyen Âge au XXIe siècle
L’épopée antique et la chanson de geste
La fin’amor et les romans de chevalerie
Récits comiques médiévaux et humanistes
Fictions baroques
Le classicisme
Les romans épistolaires
Le romantisme
Le réalisme
Le naturalisme
Les récits de guerre
L’exploration de la conscience
Interroger l’existence humaine
Le Nouveau Roman
Les récits de vie
Partie 2 • La littérature d’idées du XVIe au XVIIIe siècle
L’humanisme à la Renaissance
Le baroque
Le libertinage
Les moralistes de l’époque classique
Les philosophes des Lumières
Partie 3 • Le théâtre du XVIIe au XXIe siècle
Le théâtre baroque
La tragédie classique
La comédie classique
Le théâtre au siècle des Lumières
Le drame romantique et le théâtre de boulevard
Du théâtre de la cruauté au théâtre de l’absurde
Le théâtre engagé
Les nouvelles formes de théâtre
Partie 4 • La poésie du XIXe au XXIe siècle
La poésie romantique
Le Parnasse
Les poètes maudits
Le symbolisme
Le surréalisme et l’OuLiPo
La poésie engagée : Résistance, négritude, créolité
La poésie contemporaine
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Chapitre 3.6
Texte 3

Jean‑Paul Sartre, Les Mouches (1943)

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Texte

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Crédits : Lelivrescolaire.fr

Oreste et Électre ont décidé de venger la mort de leur père Agamemnon : Oreste a tué le roi Égisthe, meurtrier de son père et amant de sa mère, Clytemnestre. Tandis qu'Oreste entre dans la chambre de sa mère, sa sœur Électre écoute à la porte.

SCÈNE VII
ÉLECTRE, seule.

ÉLECTRE. – Est‑ce qu'elle va crier ? (Un temps. Elle prête l'oreille.) Il marche dans le couloir. Quand il aura ouvert la quatrième porte… Ah ! je l'ai voulu ! Je le veux, il faut que je le veuille encore. (Elle regarde Égisthe.) Celui‑ci est mort. C'est donc ça que je voulais. Je ne m'en rendais pas compte. (Elle s'approche de lui.) Cent fois je l'ai vu en songe, étendu à cette même place, une épée dans le cœur. Ses yeux étaient clos, il avait l'air de dormir. Comme je le haïssais, comme j'étais joyeuse de le haïr. Il n'a pas l'air de dormir, et ses yeux sont ouverts, il me regarde. Il est mort – et ma haine est morte avec lui. Et je suis là ; et j'attends, et l'autre est vivante encore, au fond de sa chambre, et tout à l'heure elle va crier. Elle va crier comme une bête. Ah ! je ne peux plus supporter ce regard. (Elle s'agenouille et jette un manteau sur le visage d'Égisthe.) Qu'est‑ce que je voulais donc ? (Silence. Puis cris de Clytemnestre.) Il l'a frappée. C'était notre mère, et il l'a frappée. (Elle se relève.) Voici : mes ennemis sont morts. Pendant des années, j'ai joui de cette mort par avance, et, à présent, mon cœur est serré dans un étau. Est‑ce que je me suis menti pendant quinze ans ? Ça n'est pas vrai ! Ça n'est pas vrai ! Ça ne peut pas être vrai : je ne suis pas lâche ! Cette minute‑ci, je l'ai voulue et je la veux encore. J'ai voulu voir ce porc immonde couché à mes pieds. (Elle arrache le manteau.) Que m'importe ton regard de poisson mort. Je l'ai voulu, ce regard, et j'en jouis. (Cris plus faibles de Clytemnestre.) Qu'elle crie ! Qu'elle crie ! Je veux ses cris d'horreur et je veux ses souffrances. (Les cris cessent.) Joie ! Joie ! Je pleure de joie : mes ennemis sont morts et mon père est vengé.

Oreste rentre, une épée sanglante à la main.
Elle court à lui.


SCÈNE VIII
ÉLECTRE, ORESTE.

ÉLECTRE. – Oreste !
Elle se jette dans ses bras.

ORESTE. – De quoi as‑tu peur ?

ÉLECTRE. – Je n'ai pas peur, je suis ivre. Ivre de joie. Qu'a‑t‑elle dit ? A‑t‑elle longtemps imploré sa grâce ?

ORESTE. – Électre, je ne me repentirai pas de ce que j'ai fait, mais je ne juge pas bon d'en parler : il y a des souvenirs qu'on ne partage pas. Sache seulement qu'elle est morte.

ÉLECTRE. – En nous maudissant ? Dis‑moi seulement cela : en nous maudissant ?

ORESTE. – Oui. En nous maudissant.

ÉLECTRE. – Prends‑moi dans tes bras, mon bien‑aimé, et serre‑moi de toutes tes forces. Comme la nuit est épaisse et comme les lumières de ces flambeaux ont de la peine à la percer !
Acte II, scènes 7 et 8, © Éditions Gallimard.
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Éclairage

À la fatalité de l'Antiquité, Sartre substitue la liberté.

La conquête et l'affirmation de la liberté passent ici par le meurtre mais la portée universelle de cet acte, clairement énoncée, lui donne son véritable sens. Dans le climat lourd de l'année 42, Sartre affirme avoir écrit Les Mouches pour soutenir le moral des résistants et il ne semble pas y avoir de raisons pour le lui contester. Il faut croire ce qu'il dit après la Libération lorsqu'il peut parler ouvertement."
Jean Bardy
« Les Mouches, tragédie de la liberté », in Raison présente, n° 117, 1996.
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Questions

1. Comment l'évolution des sentiments d'Électre est‑elle mise en scène ?

2.
Grammaire
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