Le ciel était parsemé d'étoiles, il faisait un grand froid,
et le vivier où Renart avait conduit son compère était assez
fortement pris de glace pour que l'on pût en toute sécurité
former sur lui des rondes joyeuses. Il n'y avait qu'un seul
trou, soigneusement entretenu chaque jour par les paysans
du village, et près duquel ils avaient laissé le seau qui leur
servait à puiser de l'eau. Renart, indiquant du doigt le vivier :
« Mon oncle, dit-il, c'est là que se tiennent en quantité les
barbeaux, les tanches et les anguilles ; et précisément voici
l'engin qui sert à les prendre. » (Il montrait le seau.) « Il suffit
de le tenir quelque temps plongé dans l'eau, puis de l'en tirer
quand on sent à sa pesanteur qu'il est garni de poissons. — Je
comprends, dit Ysengrin, et pour bien faire, je crois, beau neveu,
qu'il faudrait attacher l'engin à ma queue ; c'est apparemment
ainsi que vous faites vous-mêmes quand vous voulez avoir
une bonne pêche. — Justement, dit Renart, c'est merveille
comme vous comprenez aisément. Je vais faire ce que vous
demandez. » Il serre fortement le seau à la queue d'Ysengrin.
« Et maintenant, vous n'avez plus qu'à vous tenir immobile
pendant une heure ou deux, jusqu'à ce que vous sentiez les
poissons arriver en foule dans l'engin. — Je comprends fort
bien ; pour de la patience j'en aurai tant qu'il faudra. »