Et puis Berlin. Une vaste pièce assez sombre où il y avait d'un côté deux lits couverts d'immenses édredons rouges et, de l'autre des fauteuils et une table ronde... maman est assise à cette table avec un « oncle » que je ne connais pas... [...]
Maman parle avec lui à voix basse, et moi j'ai trouvé un jeu très amusant : déjà revêtue de ma longue chemise de nuit, je saute à pieds joints d'un lit sur l'autre, les lits sont séparés par un assez large espace, il faut bien viser et plouf, tomber de l'autre côté, s'enfoncer dans l'énorme édredon, se rouler en faisant du bruit, en poussant des cris...
Maman me dit : « Arrête, tu nous déranges... demain nous allons nous séparer, il n'y a pas de quoi tant s'amuser. » Instantanément je me calme, je m'étends de tout mon long dans l'un des lits. J'entends maman qui dit d'un air extrêmement surpris : « Vraiment ? Elle est... » Je ne perçois pas le mot qui suit...
Quand nous sommes restées seules, je demande à maman : « Qu'est-ce que l'oncle t'a dit quand tu as eu l'air si étonnée ? – Oh je ne sais plus. – Si, dis-le-moi. Tu as dit : “Elle est...” Qui c'était, elle ? » Maman hésite et puis elle dit : « Elle – c'était Véra, la femme de ton père. – Elle est quoi ? – Rien... – Si, il faut que tu me le dises : Qu'est-ce qu'elle est ? » Maman a l'air de penser à quelque chose qui l'amuse... « Eh bien, si tu veux le savoir, il m'a dit qu'elle est bête. »