), puis les
pièces dadaïstes et surréalistes ouvrent une période
d'innovations théâtrales. Les théories d'Antonin Artaud
anticipent ensuite le théâtre de l'absurde, dans les
années 1950‑1960. Les dramaturges ne se regroupent
pas dans un mouvement mais partagent le même rejet
des règles traditionnelles du théâtre et la volonté de
déconstruire le langage et l'intrigue.
Contexte
Ces expériences théâtrales de déconstruction
des codes traditionnels naissent du choc que
provoquent les deux guerres mondiales : les atrocités
et le traumatisme de la Shoah nourrissent l'incompréhension
du sens de l'existence humaine.
Notions-clés
Absurde, pessimisme, tragique,
comique, rejet des règles, langage vidé de son sens.
Ressource affichée de l'autre côté. Faites défiler pour voir la suite.
Ressource affichée de l'autre côté. Faites défiler pour voir la suite.
Le théâtre de la cruauté : Antonin Artaud
Antonin Artaud est un auteur et metteur en scène du début
du XXe siècle, mais il est surtout connu pour ses écrits théoriques
sur le théâtre, notamment Le Théâtre et son double,
paru en 1938. Selon lui, ce n'est pas le contenu du texte qui
importe mais véritablement le jeu théâtral, l'action, surtout
quand elle est inopinée ou improvisée. Il refuse les pièces
écrites afin de privilégier les « mises en scène directes ».
Pour lui, la scène doit être supprimée : le spectacle doit se
dérouler dans la salle entière et maintenir le public « dans
un bain constant de lumière, d'images, de mouvements et de
bruits ». C'est le « théâtre total ».
Le théâtre doit ainsi heurter la sensibilité du public, à travers
des images d'une grande violence. Le théâtre de la cruauté
rejoint donc la tragédie classique car l'objectif est la catharsis,
la purgation des passions des spectateurs et spectatrices.
Mais il rencontre peu de succès auprès du public.
Texte A
Antonin Artaud, « Le théâtre de la cruauté »,
Le Théâtre et son double
Au point d'usure où notre sensibilité est parvenue, il est
certain que nous avons besoin avant tout d'un théâtre
qui nous réveille : nerfs et cœur. […] C'est pour prendre
la sensibilité du spectateur sur toutes ses faces, que nous
préconisons un théâtre tournant, et qui au lieu de faire
de la scène et de la salle deux mondes clos, sans communication
possible, répande ses éclats visuels et sonores
sur la masse entière des spectateurs.
Antonin Artaud
« Le théâtre de la cruauté »,
Le Théâtre et son double, 1938.
Ressource affichée de l'autre côté. Faites défiler pour voir la suite.
L'absurde : une vision pessimiste de la condition humaine
Dans les années 1950 apparait un nouveau théâtre, principalement
chez Ionesco, Beckett et Adamov. À l'âge de 21 ans,
Beckett est poignardé dans la rue et gravement atteint. Guéri,
il rencontre son agresseur. À la question « Pourquoi m'avez‑vous
attaqué ? », l'homme finit par répondre : « Je ne sais pas,
monsieur ». Cet incident le marque profondément.
Les dramaturges de l'absurde développent une vision pessimiste
et tragique de la condition humaine et cherchent à
mettre en scène l'absence de sens de l'existence.
Remarque : le terme « absurde » peut prêter à confusion.
Albert Camus développe une théorie philosophique de l'absurde,
mais les dramaturges du théâtre de l'absurde ont
gardé leurs distances avec la philosophie. Camus écrit également
des pièces de théâtre autour de thématiques philosophiques,
mais elles n'ont pas les mêmes caractéristiques
que le théâtre de l'absurde.
Ressource affichée de l'autre côté. Faites défiler pour voir la suite.
Rejeter les règles traditionnelles du théâtre
Les dramaturges du théâtre de l'absurde mêlent comique
et tragique afin de mettre le public mal à l'aise et lui faire
prendre conscience de l'étrangeté du monde (voir texte B).
Ils rejettent tous les codes de la représentation théâtrale :
l'action, la caractérisation psychologique des personnages,
la vraisemblance permise par le contexte spatio-temporel.
Les personnages sont des anti-héros, le public connait peu
de choses de leur vie ou de leur caractère. Chez Adamov et
Beckett, les corps sont mutilés, infirmes, dégradés.
De même, toute forme traditionnelle d'intrigue est rejetée :
dans En attendant Godot, les personnages attendent en vain
un personnage dont le public ne sait rien. Chez Beckett, l'action
s'appuie sur une logique de répétition, de piétinement,
ou encore de dégradation (Fin de partie, Oh les beaux jours !).
Texte B
Eugène Ionesco, Notes et Contre-notes
Pour s'arracher au quotidien, à l'habitude, à la paresse
mentale qui nous cache l'étrangeté du monde, il faut
recevoir comme un véritable coup de matraque. […]
Je n'ai jamais compris, pour ma part, la différence que
l'on fait entre comique et tragique. Le comique étant
l'intuition de l'absurde, il me semble plus désespérant
que le tragique. Le comique n'offre pas d'issue. Je dis
« désespérant », mais, en réalité, il est au-delà ou en-deçà
du désespoir ou de l'espoir.
Ressource affichée de l'autre côté. Faites défiler pour voir la suite.
Une parole « vidée
de son contenu » (Ionesco)
Face à un monde vidé de son sens, la parole se détache de sa
fonction de communication pour devenir un objet ludique.
En apprenant l'anglais avec la méthode Assimil, Ionesco prend
conscience de l'importance des clichés qui parcourent le langage et des exemples sans queue ni tête de ces méthodes de
conversation. Il décide alors d'écrire La Cantatrice chauve en
utilisant et en répétant des phrases issues de cette méthode.
Dans les dialogues des pièces Un mot pour un autre ou Finissez vos phrases ! de Tardieu, les mots principaux (noms,
verbes) sont soit remplacés par d'autres, soit absents, sans
que les personnages ne paraissent s'en rendre compte.
Ressource affichée de l'autre côté. Faites défiler pour voir la suite.
Questions
Ressource affichée de l'autre côté. Faites défiler pour voir la suite.
Comprendre
1. Texte B. Quelle vision
Ionesco a-t-il du comique ?
2. Doc. 1. Observez la
photographie et expliquez
en quoi elle peut permettre
d'éclairer le texte B.
4. Activité d'appropriation. Par petits groupes, choisissez un extrait parmi les textes du chapitre, et proposez-en une mise en scène. Réfléchissez à la scénographie : lumières,
décors, sons.
5. Carte mentale Complétez la carte proposée ou réalisez la vôtre sur