Il ne peut y avoir de « morale sexuelle » de tous qui s'impose à la « morale sexuelle » de chacun. Chacun connaît la nécessité, pour l'individu, de vivre en accord avec ce qui reste le plus profondément inexprimé, par peur, honte, conditionnement social ou répression, je veux dire sa sexualité.
Et qu'il s'agisse d'hétérosexualité ou d'homosexualité, cette relation à l'autre ne peut jouer comme un facteur d'équilibre que débarrassée de la clandestinité ou de l'autocensure auxquelles contraint bien souvent notre environnement et, en premier lieu, nos lois qui, dans notre culture, provoquent au changement des mentalités, avant de changer elles-mêmes.
Certes, comme toute liberté, ce droit de choisir sa sexualité connaît ses limites, classiques au demeurant.
Premièrement, la loi doit intervenir dans tous les cas pour réprimer la violence. Et il y a violence sexuelle dès qu'il y a absence de consentement d'un partenaire auquel, précisément, on dénie le droit de choisir.
Deuxièmement, la loi doit intervenir pour protéger — en dehors même de la violence — la vulnérabilité de certaines victimes presque désignées :
les enfants, les mineurs, les handicapés, les hommes et les femmes « sous influence », c'est-à-dire ne pouvant, en raison de l'autorité ou de l'ascendant qu'ils ou qu'elles subissent, librement se déterminer.
Troisièmement, la loi doit intervenir pour sanctionner un préjudice et non traduire un quelconque impératif moral dans noire société civile.
La morale religieuse, pour laquelle l'amour ne se trouve justifié que dans sa fin de procréation, relève, comme la liberté sexuelle, de la liberté de conscience de chacun.
Elle ne peut donc, même masquée, décider du « bon choix » sexuel. La « norme » n'est, en cette matière et dans notre pays, ni affaire de majorité politique ou sociologique, ni affaire de loi civile. La « norme » sexuelle ne se définit pas. Elle se dessine à l'échelle de chaque corps, de chaque enfance, de chaque culture, de chaque plaisir, à condition — je le répète — de ne blesser, de n'agresser ou de ne violenter personne.