La Vallée
Non ! je ne verrai plus de si belle vallée,
Que celle où sur tes pas je descendis un jour ;
Où l'eau, parmi les fleurs lentement écoulée,
Trouve une eau qui la cherche et s'y joint sans retour.
J'étais bien ! tout parlait à mon âme ravie.
Ah ! les derniers rayons du jour et de la vie
Répandront sur mes yeux leur mourante
langueur1,
Avant que ce tableau s'efface de mon cœur.
Et, pourtant, ce n'est pas cette belle verdure,
Ces ruisseaux murmurants sous les jeunes roseaux,
Ni cette ombre des bois, cette ombre où la nature
Mêlait son harmonie au doux chant des oiseaux ;
Non, ce n'est pas du ciel la lumière enchantée,
Ni l'onde éblouissante, où ma vue arrêtée
Ne pouvait soutenir l'éclat d'un sable d'or,
Qui fait en y rêvant que je tressaille encor :
C'était toi, mon amour, mon avenir, mon âme !
C'était toi, qui m'aimais ; toi, qui semblais heureux !
C'était ton regard pur qui répandait sa flamme
Sur notre plus beau jour réfléchi dans tes yeux.
Le veux‑tu ? retournons sous ces paisibles ombres,
Loin d'un monde orageux, loin de nos cités sombres ;
Viens ! cachés dans les fleurs, nos destins, nos amours,
Comme les deux ruisseaux se confondront toujours !