Français 1re

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Repères - Histoire
Partie 1 • Le roman et le récit du Moyen Âge au XXIe siècle
L’épopée antique et la chanson de geste
La fin’amor et les romans de chevalerie
Récits comiques médiévaux et humanistes
Fictions baroques
Le classicisme
Les romans épistolaires
Le romantisme
Le réalisme
Le naturalisme
Les récits de guerre
L’exploration de la conscience
Interroger l’existence humaine
Le Nouveau Roman
Les récits de vie
Partie 2 • La littérature d’idées du XVIe au XVIIIe siècle
L’humanisme à la Renaissance
Le baroque
Le libertinage
Les moralistes de l’époque classique
Les philosophes des Lumières
Partie 3 • Le théâtre du XVIIe au XXIe siècle
Le théâtre baroque
La tragédie classique
La comédie classique
Le théâtre au siècle des Lumières
Le drame romantique et le théâtre de boulevard
Les réécritures des mythes antiques
Du théâtre de la cruauté au théâtre de l’absurde
Le théâtre engagé
Les nouvelles formes de théâtre
Partie 4 • La poésie du XIXe au XXIe siècle
Le Parnasse
Les poètes maudits
Le symbolisme
Le surréalisme et l’OuLiPo
La poésie engagée : Résistance, négritude, créolité
La poésie contemporaine
Pour aller plus loin
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Chapitre 4.1
Texte B
Exclusivité numérique

Alfred de Vigny, Les Destinées (1864, posthume)

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Texte

« Le Mont des Oliviers » est un long poème en trois parties, qui traduit l'angoisse du poète et de profonds doutes religieux. Il se clôt par la mention désespérante du « silence éternel de la Divinité. »

Le Mont des Oliviers


Alors il était nuit et Jésus marchait seul,
Vêtu de blanc ainsi qu'un mort de son linceul1 ;
Les disciples2 dormaient au pied de la colline.
Parmi les oliviers qu'un vent sinistre incline
Jésus marche à grand pas en frissonnant comme eux ;
Triste jusqu'à la mort ; l'œil sombre et ténébreux,
Le front baissé, croisant les deux bras sur sa robe
Comme un voleur de nuit cachant ce qu'il dérobe ;
Connaissant les rochers mieux qu'un sentier uni,
Il s'arrête en un lieu nommé Gethséman :
Il se courbe, à genoux, le front contre la terre,
Puis regarde le ciel en appelant : « Mon Père ! »
— Mais le ciel reste noir, et Dieu ne répond pas.
Il se lève étonné3, marche encore à grands pas.
Froissant les oliviers qui tremblent. Froide et lente
Découle de sa tête une sueur sanglante.
Il recule, il descend, il crie avec effroi :
« Ne pouviez‑vous prier et veiller avec moi ? »
Mais un sommeil de mort accable les apôtres,
Pierre4 à la voix du maître est sourd comme les autres.
Le Fils de l'Homme5 alors remonte lentement.
Comme un pasteur6 d'Égypte, il cherche au firmament7
Si l'Ange ne luit pas au fond de quelque étoile.
Mais un nuage en deuil s'étend comme le voile
D'une veuve et ses plis entourent le désert.
Jésus, se rappelant ce qu'il avait souffert
Depuis trente‑trois ans, devint homme, et la crainte
Serra son cœur mortel d'une invincible étreinte.
Il eut froid. Vainement, il appela trois fois :
« Mon père ! » Le vent seul répondit à sa voix…
Il tomba sur le sable assis et, dans sa peine,
Eut sur le monde et l'homme une pensée humaine.
— Et la terre trembla, sentant la pesanteur
Du Sauveur8 qui tombait aux pieds du Créateur9.
Première partie, vers 1 à 34 ; première publication dans la Revue des Deux Mondes, période initiale, tome 2, section « Poèmes philosophiques », 1843.
1. Tissu dont on enveloppe le corps des morts.
2. Quatre apôtres (disciples proches, que Jésus a choisis pour poursuivre et diffuser son enseignement) se trouvent avec lui.
3. Comme frappé par le tonnerre, foudroyé.
4. L'un des apôtres, qui avait dit qu'il ne trahirait jamais Jésus.
5. Jésus.
6. Berger, mais au sens métaphorique : guide spirituel. Référence à Moïse, qui a guidé le peuple hébreu à travers le désert pour le sortir d'Égypte, où il était réduit en esclavage.
7. Ciel.
8. Jésus.
9. Dieu.
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Doc. 

Placeholder pour Andrea Mantegna, Agonie au jardin des Oliviers, 1455-1456, tempera sur toile, 62 x 80 cm, National Gallery, Londres, Royaume-UniAndrea Mantegna, Agonie au jardin des Oliviers, 1455-1456, tempera sur toile, 62 x 80 cm, National Gallery, Londres, Royaume-Uni
Le zoom est accessible dans la version Premium.
Andrea Mantegna, Agonie au jardin des Oliviers, 1455‑1456, tempera sur toile, 62 x 80 cm, National Gallery, Londres, Royaume‑Uni.
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Éclairage

Les évangiles de Matthieu (26 :30‑50) et Marc (14 :26‑46) racontent la dernière nuit de Jésus sur le Mont des Oliviers, juste avant sa mise à mort sur la croix. Une dernière fois, il doit résister à la tentation et lutte seul contre ses doutes car les apôtres (disciples proches) qui l'ont accompagné, se sont endormis.
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Questions

1. En quoi ce poème peut‑il être considéré comme un apologue ?

2.
Grammaire
Analysez l'interrogation au vers 18, et réécrivez‑la dans un niveau de langue familier.
Afficher la correction
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Extrait écho
Gérard de Nerval, Les filles du feu (1854)

Ce célèbre épisode biblique a inspiré d'autres écrivains romantiques, comme Gérard de Nerval, qui compose ce long poème dont chaque partie est un sonnet.

Le Christ aux Oliviers

Dieu est mort ! le ciel est vide…
Pleurez ! enfants, vous n'avez plus de père.
Jean Paul1

I

Quand le Seigneur, levant au ciel ses maigres bras,
Sous les arbres sacrés, comme font les poètes,
Se fut longtemps perdu dans ses douleurs muettes,
Et se jugea trahi par des amis ingrats,

Il se tourna vers ceux qui l'attendaient en bas
Rêvant d'être des rois, des sages, des prophètes…
Mais engourdis, perdus dans le sommeil des bêtes,
Et se prit à crier : « Non, Dieu n'existe pas ! »

Ils dormaient. « Mes amis, savez‑vous la nouvelle ?
J'ai touché de mon front à la voûte éternelle ;
Je suis sanglant, brisé, souffrant pour bien des jours !

Frères, je vous trompais : Abîme ! abîme ! abîme !
Le dieu manque à l'autel où je suis la victime…
Dieu n'est pas ! Dieu n'est plus ! » Mais ils dormaient toujours !

II

Il reprit : « Tout est mort ! J'ai parcouru les mondes ;
Et j'ai perdu mon vol dans les chemins lactés,
Aussi loin que la vie, en ses veines fécondes,
Répand des sables d'or et des flots argentés :

Partout le sol désert côtoyé par des ondes,
Des tourbillons confus d'océans agités…
Un souffle vague émeut les sphères vagabondes,
Mais nul esprit n'existe en ces immensités.

En cherchant l'œil de Dieu, je n'ai vu qu'une orbite
Vaste, noire et sans fond, d'où la nuit qui l'habite
Rayonne sur le monde et s'épaissit toujours ;

Un arc‑en‑ciel étrange entoure ce puits sombre,
Seuil de l'ancien chaos dont le néant est l'ombre,
Spirale engloutissant les Mondes et les Jours !

III

Immobile Destin, muette sentinelle,
Froide nécessité !… Hasard qui, t'avançant
Parmi les mondes morts sous la neige éternelle,
Refroidis, par degré, l'univers pâlissant,

Sais‑tu ce que tu fais, puissance originelle,
De tes soleils éteints, l'un l'autre se froissant…
Es‑tu sûr de transmettre une haleine immortelle,
Entre un monde qui meurt et l'autre renaissant ?…

Ô mon père ! Est‑ce toi que je sens en moi‑même ?
As‑tu pouvoir de vivre et de vaincre la mort ?
Aurais‑tu succombé sous un dernier effort

De cet ange des nuits que frappa l'anathème2 ?…
Car je me sens tout seul à pleurer et souffrir,
Hélas ! et, si je meurs, c'est que tout va mourir ! »

IV

Nul n'entendait gémir l'éternelle victime,
Livrant au monde en vain tout son cœur épanché ;
Mais prêt à défaillir3 et sans force penché,
Il appela le seul éveillé dans Solyme4 :

« Judas5 ! lui cria‑t‑il, tu sais ce qu'on m'estime,
Hâte‑toi de me vendre, et finis ce marché :
Je suis souffrant, ami ! sur la terre couché…
Viens ! ô toi qui, du moins, as la force du crime ! »

Mais Judas s'en allait, mécontent et pensif,
Se trouvant mal payé, plein d'un remords si vif
Qu'il lisait ses noirceurs sur tous les murs écrites…

Enfin Pilate6 seul, qui veillait pour César,
Sentant quelque pitié, se tourna par hasard :
« Allez chercher ce fou ! » dit‑il aux satellites7.

V

C'était bien lui, ce fou, cet insensé sublime…
Cet Icare oublié qui remontait les cieux,
Ce Phaéton8 perdu sous la foudre des dieux,
Ce bel Atys9 meurtri que Cybèle ranime !

L'augure10 interrogeait le flanc de la victime,
La terre s'enivrait de ce sang précieux…
L'univers étourdi penchait sur ses essieux,
Et l'Olympe un instant chancela vers l'abîme.

« Réponds ! criait César à Jupiter Ammon11,
Quel est ce nouveau dieu qu'on impose à la terre ?
Et si ce n'est un dieu, c'est au moins un démon… »

Mais l'oracle12 invoqué pour jamais dut se taire ;
Un seul pouvait au monde expliquer ce mystère :
– Celui qui donna l'âme aux enfants du limon13.
Les Filles du feu, dernière partie : Les Chimères.
1. Pseudonyme de Johann Paul Friedrich Richter, écrivain allemand (1763‑1825).
2. La malédiction. Ce vers fait référence au diable.
3. Perdre connaissance.
4. Jérusalem.
5. L'apôtre qui est en train de le trahir et à cause duquel il va être arrêté.
6. Préfet qui prononce la condamnation à mort de Jésus.
7. Serviteurs, gardes du corps.
8. Fils du dieu Soleil (Helios) : il emprunte le char de son père, en perd le contrôle et embrase le ciel et la terre. Zeus le foudroie pour cela.
9. L'hermaphrodite Cybèle tombe amoureuse de son fils Atys, mais celui‑ci perd sa virginité dans les bras d'une naïade. Furieuse, Cybèle frappe de folie Atys, qui s'enfuit et s'émascule.
10. Dans l'Antiquité, personne chargée d'interpréter les signes des dieux afin d'en tirer des présages. L'un des moyens de communiquer avec les dieux et de sacrifier un animal et de lire dans ses entrailles.
11. Divinité qui mêle les traits du dieu égyptien Amon et du dieu grec Zeus.
12. La divinité consultée.
13. Boue argileuse à partir de laquelle Dieu a modelé l'homme, selon la Bible (Genèse, 2:7).

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