Nous avons donc établi successivement les trois propositions suivantes : le suicide varie en raison inverse du degré d'intégration [dans] la société religieuse, domestique, politique. Ce rapprochement démontre que, si ces différentes sociétés ont sur le suicide une influence modératrice, ce n'est pas par suite de caractères particuliers à chacune d'elles, mais en vertu d'une cause qui leur est commune à toutes. […] La cause ne peut s'en trouver que dans une même propriété que tous ces groupes sociaux possèdent, quoique, peut-être, à des degrés différents. Or, la seule qui satisfasse à cette condition, c'est qu'ils sont tous des groupes sociaux, fortement intégrés. Nous arrivons donc à cette conclusion générale : le suicide varie en raison inverse du degré d'intégration [dans les] groupes sociaux dont fait partie l'individu. […] Plus les groupes auxquels il appartient sont affaiblis, moins il en dépend, plus, par suite, il ne relève que de lui-même pour ne reconnaître d'autres règles de conduite que celles qui sont fondées dans ses intérêts privés. Si donc on convient d'appeler égoïsme cet état où le moi individuel s'affirme avec excès en face du moi social et aux dépens de ce dernier, nous pourrons donner le nom d'égoïste au type particulier de suicide qui résulte d'une individuation démesurée.