Ainsi, être un jeune de « cité », c'est être désavantagé sur le plan scolaire à deux niveaux : le faible
capital culturel initial est redoublé par les conditions d'apprentissage dans certains établissements. Memet raconte qu'il ne savait ni lire ni écrire à son arrivée en France, mais qu'il est parvenu à rattraper son retard. Il a cependant abandonné ses études l'année du bac professionnel parce qu'il ne supportait plus qu'on le traite de « fayot » : « On me traitait de fayot… Dans une classe, t'as vingt élèves, t'en as cinq qui travaillent, les cinq, c'est des fayots parce qu'ils écoutent les profs, parce qu'ils font les devoirs… À la fin, je pouvais plus. J'en avais marre. Donc le problème, ce qu'il y a dans les banlieues, c'est ça. Un enfant, il arrive pas à continuer ses études. Arrivé à un niveau, il arrive plus, ou il se fait engrainer par ses amis. Mais par contre, y'a un cas, un copain […] son père, lui, il était chauffeur à l'ambassade d'Iran, ils ont déménagé, ils sont partis dans les beaux quartiers, à Paris, et l'éducation, c'est pas pareil. Lui, il arrive à un niveau [élevé]… On a essayé d'ouvrir une association culturelle, c'est ce qu'il faut à mon avis, pour empêcher tout ça, pour pas que les enfants vont dans le mauvais chemin. » Il se sent responsable de son dernier petit frère, qui redouble son CM2. Conscient des tentations auxquelles il peut être soumis, il est vigilant, lui achète des baskets « de marque » et prévoit de l'envoyer en internat.