Article premier. – La femme naît libre et demeure égale à l'homme en droits.
Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.
Article 2 – Le but de toute association politique est la conservation des droits
naturels et imprescriptibles de la femme et de l'homme : ces droits sont la liberté,
la propriété, la sûreté, et surtout la résistance à l'oppression.
Article 3 – Le principe de souveraineté réside essentiellement dans la Nation,
qui n'est que la réunion de la femme et de l'homme : nul corps, nul individu, ne
peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément.
Article 4 – La liberté et la justice consistent à rendre tout ce qui appartient à
autrui ; ainsi l'exercice des droits naturels de la femme n'a de bornes que la tyrannie
perpétuelle que l'homme lui oppose ; ces bornes doivent être réformées par les
lois de la nature et de la raison. […]
Article 10 – Nul ne doit être inquiété pour ses opinfilledions, mêmes fondamentales ;
la femme a le droit de monter sur l'échafaud, elle doit avoir également celui de
monter à la Tribune, pourvu que ses manifestations ne troublent pas l'ordre public
établi par la loi.
POSTAMBULE.
Femme, réveille‑toi ; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l'univers ; reconnais tes droits.
Le puissant empire de la nature n'est plus environné de préjugés, de fanatisme, de superstition et de mensongesa. Le flambeau de la vérité a dissipé tous les nuages de la sottise et de l'usurpation. L'homme esclave a
multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes pour briser ses fers. Devenu libre, il est devenu injuste envers sa compagne. Ô femmes ! Femmes, quand cesserez‑vous d'être aveugles ? Quels sont les avantages que vous avez recueillis dans la Révolution ? Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé. Dans les siècles de corruption vous n'avez régné que sur la faiblesse des hommes.
Votre empire est détruit ; que vous reste‑t‑il donc ? La conviction des injustices de l'hommeb. […] Quelles que soient les barrières que l'on vous oppose, il est en votre pouvoir de les affranchir ; vous n'avez qu'à le vouloir. Passons maintenant à l'effroyable tableau de ce que vous avez été dans la société ; et
puisqu'il est question, en ce moment, d'une éducation nationale, voyons si nos sages législateurs penseront sainement sur l'éducation des femmesc. […]
Une main divine semble répandre partout l'apanage de l'homme, la liberté ; la loi seule a le droit de réprimer cette liberté, si elle dégénère en licence ; mais elle doit être égale pour tous, c'est elle surtout qui doit renfermer l'Assemblée nationale dans son décret, dicté par la prudence et par la justiced. Puisse‑t‑elle agir de même pour l'État de la France, et se rendre aussi attentive sur les nouveaux abus, comme elle l'a été sur les anciens qui deviennent chaque jour plus effroyables !
Mon opinfilledion serait encore de raccommoder le pouvoir exécutif avec le pouvoir
législatif, car il me semble que l'un est tout, et que l'autre n'est rien ; d'où naîtra, malheureusement peut‑être, la perte de l'Empire français.
Je considère ces deux pouvoirs, comme l'homme et la femme qui doivent être unis, mais égaux en force et en vertu, pour faire un bon ménagee.