Un homme peut très bien vivre sans travailler, et sans produire d'œuvres utiles, mais il ne peut pas vivre une vie authentiquement humaine sans action ni parole. Car dans une telle éventualité « ce n'est plus une vie humaine, car elle n'est pas vécue parmi les hommes ».
La vie humaine est action, c'est-à-dire commencement, invention, mise en mouvement et donc elle produit de l'inattendu, du surprenant. Elle s'oppose donc à la fabrication, supposée planifiée à l'avance. Mais cet homme, faiseur d'actes, n'est acteur que dans la mesure où il est « aussi un diseur », celui qui dit ce qu'il est. La parole dit l'action, l'action est parfois faite en paroles, et en « agissant et en parlant, les hommes font voir qui ils sont, révèlent activement leurs identités personnelles uniques. »
L'espace dans lequel un individu apparaît aux autres, et où les autres lui apparaissent, précède la constitution du domaine public et de toutes les formes du gouvernement. Cette vie politique, fondée sur la parole et l'action, est la seule véritablement aboutie : une vie libre dans laquelle on ne consacre du temps qu'aux choses qui ne sont ni nécessaires (travail) ni utiles (œuvres).
La vita activa trouve donc dans la politique – réunion de l'action et de la parole – sa dignité.