Parti de Séville en 1519, Magellan cherche un passage pour contourner le continent américain. Il envoie pour cela deux navires en éclaireurs, dont l'un déserte.
Ignorant tout de la désertion, Magellan attend plusieurs semaines le retour du San Antonio. Il fait pour cela mettre à l'ancre dans une anse baptisée « baie des Sardines », où les marins se repaissent, outre des clupéidés1 en question, de tiges et de racines d'une variété de céleri sauvage – Apium australe – qui pousse en abondance dans les marais environnants. Ils en font aussi des conserves, avec ce qui reste des trente hectolitres de vinaigre de Moguer chargés à Séville. [...] Durant trois mois et vingt jours, les nefs2 errent sans avitaillement3. La maladie et la faim s'installent. [...] Pourtant, sur 166 marins qui s'élancent à l'assaut du Pacifique, seuls une dizaine y laissent la vie – un taux de mortalité ridiculement faible comparé à celui des voyages transpacifiques des décennies suivantes. Pourquoi un tel miracle ? Eh bien... grâce aux tiges de céleri sauvage que les marins consommèrent dans la baie des Sardines, et dont ils firent des conserves vinaigrées, car celles-ci sont riches en vitamine C. [...] Et parmi ces survivants, parmi ces hommes qui se nourrissent de céleri, de rats et de cuir bouilli, il y a Antonio Pigafetta, à qui nous devons le récit le plus détaillé de l'expédition. Sans le céleri sauvage et sans le vinaigre de Moguer, il n'y aurait peut-être pas d'histoire. Comme quoi les légendes tiennent à peu de choses.