Dans Du contrat social
, Jean‑Jacques Rousseau montre que
l'être humain qui passe de l'état de nature à l'état de société
doit adopter un pacte social pour garantir l'égalité des droits.
Alors que les femmes sont exclues de la Déclaration des droits
de l'homme et du citoyen
, Olympe de Gouges s'inspire de la
pensée rousseauiste pour écrire sa propre déclaration. Elle
est également l'une des grandes figures de la lutte contre
l'esclavage (
voir
).
Forme du contrat social de l'Homme et de la Femme
«
Nous N et N, mus par notre propre volonté, nous unissons pour
le terme de notre vie, et pour la durée de nos penchants mutuels, aux
conditions suivantes : nous entendons et voulons mettre nos fortunes
en communauté, en nous réservant cependant le droit de les séparer
en faveur de nos enfants et de ceux que nous pourrions avoir d'une
inclination particulière, reconnaissant mutuellement que notre bien
appartient directement à nos enfants, de quelque lit qu'ils sortent1 et
que tous indistinctement ont le droit de porter le nom des pères et mères
qui les ont avoués, et nous imposons de souscrire à la loi qui punit
l'abnégation2 de son propre sang. Nous nous obligeons également, au
cas de séparation, de faire le partage de notre fortune […]. »
Voilà à‑peu‑près la formule de l'acte conjugal dont je propose l'exécution.
À la lecture de ce bizarre écrit, je vois s'élever contre moi les
tartuffes3, les
bégueules4, le clergé et toute la
séquelle5 infernale. Mais combien il offrira aux
sages de moyens moraux pour arriver à la perfectibilité d'un gouvernement heureux ! J'en vais donner en peu de mots la preuve physique. Le riche épicurien
sans enfants trouve fort bon d'aller chez son voisin pauvre augmenter sa famille.
Lorsqu'il y aura une loi qui autorisera la femme du pauvre à faire adopter au
riche ses enfants, les liens de la société seront plus resserrés, et les mœurs plus
épurées. Cette loi conservera peut-être le bien de la communauté, et retiendra
le désordre […].
Il était bien nécessaire que je dise quelques mots sur les troubles que cause,
dit‑on, le décret en faveur des hommes de couleur, dans nos îles. […]
Les colons
prétendent régner en despotes sur des hommes dont ils sont les pères et les
frères6 ; et, méconnaissant les droits de la nature, ils en poursuivent la source
jusque dans la plus petite teinte de leur sang. Ces colons inhumains disent :
« Notre sang circule dans leurs veines, mais nous le répandrons tout, s'il le faut,
pour assouvir notre cupidité, ou notre aveugle ambition. » C'est dans ces lieux
les plus près de la nature, que le père méconnaît le fils […]. Une main divine
semble répandre partout l'apanage de l'homme, la liberté […] mais elle doit être
égale pour tous.