Français 4e - 2022

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Questionnement 1 : Dire l'amour
Ch. 1
Comment dire les nuances de l'amour ?
Ch. 2
Roméo et Juliette : une histoire d’amour mythique ?
Questionnement 2 : Individu et société : confrontations de valeurs ?
Ch. 3
Des valeurs en confrontation ?
Ch. 4
Le Cid entre amour, honneur et devoir ?
Questionnement 3 : La fiction pour interroger le réel
Ch. 6
« Un parricide » : le récit d’un drame social ?
Ch. 7
« Magie » : un récit aux frontières du réel ?
Questionnement 4 : Informer, s’informer, déformer ?
Ch. 8
Comment mieux informer et s’informer ?
Questionnement complémentaire : La ville, lieu de tous les possibles ?
Ch. 9
La ville, un personnage de roman ?
Ch. 10
Comment la science-fiction imagine-t-elle la ville ?
Étude de la langue
Ch. 11
Lexique
Ch. 12
Grammaire
Ch. 13
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Ch. 14
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Chapitre 5
Texte et image 2

Sauver ou se sauver ?

Questionnement 2 - Individu et société : confrontation de valeurs ?
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Jean Valjean, auteur d'un vol pour lequel il est recherché, a décidé de se racheter en employant l'argent de l'évêque pour faire le bien. Il a ainsi fait prospérer une entreprise et sa région, puis est devenu maire, sous le nom de M. Madeleine.

M. Madeleine passait un matin dans une ruelle non pavée de Montreuil‑sur‑Mer. Il entendit du bruit et vit un groupe à quelque distance. Il y alla. Un vieux homme, nommé le père Fauchelevent, venait de tomber sous sa charrette dont le cheval s'était abattu. [...]
M. Madeleine arriva. On s'écarta avec respect. [...]
– Écoutez, reprit Madeleine, il y a encore assez de place sous la voiture pour qu'un homme s'y glisse et la soulève avec son dos. Rien qu'une demi‑minute, M. Madeleine arriva. On s'écarta avec respect. [...] et l'on tirera le pauvre homme. Y a‑t‑il quelqu'un qui ait des reins et du cœur ? Cinq louis d'or à gagner !
Personne ne bougea dans le groupe. [...]
– Ce n'est pas la bonne volonté qui leur manque, dit une voix.
M. Madeleine se retourna, et reconnut Javert1. Il ne l'avait pas aperçu en arrivant. Javert continua :
– C'est la force. Il faudrait  être un terrible homme pour faire la chose de lever une voiture comme cela sur son dos.
Puis regardant fixement M. Madeleine, il poursuivit en appuyant sur chacun des mots qu'il prononçait :
– Monsieur Madeleine, je n'ai jamais connu qu'un seul homme capable de faire ce que vous demandez là.
Madeleine tressaillit.
Javert ajouta avec un air d'indifférence, mais sans quitter des yeux Madeleine :
– C'était un forçat.
– Ah ! dit Madeleine.
– Du bagne de Toulon.
Madeleine devint pâle.
Cependant la charrette continuait à s'enfoncer lentement. [...]
Madeleine leva la tête, rencontra l'œil de faucon de Javert toujours attaché  sur lui, regarda les paysans immobiles, et sourit tristement. Puis, sans dire une parole, il tomba à genoux, et avant même que la foule eût eu le temps de jeter un cri, il était sous la voiture. Il y eut un affreux moment d'attente et de silence. [...]
Tout à coup on vit l'énorme masse s'ébranler, la charrette se soulevait lentement, les roues sortaient à demi de l'ornière. On entendit une voix étouffée qui criait : Dépêchez‑vous ! Aidez ! C'était Madeleine qui venait de faire un dernier effort. Ils se précipitèrent. Le dévouement d'un seul avait donné de la force et du courage à tous. La charrette fut enlevée par vingt bras. Le vieux Fauchelevent était sauvé.
Madeleine se releva. Il était blême, quoique ruisselant de sueur. Ses habits étaient déchirés et couverts de boue. Tous pleuraient. Le vieillard lui baisait les genoux et l'appelait le bon Dieu. Lui, il avait sur le visage je ne sais quelle expression de souffrance heureuse et céleste, et il fixait son œil tranquille sur Javert qui le regardait toujours.
Victor Hugo
Les Misérables, tome I, livre 5, chapitre 6, 1862.

1. Il était gardien au bagne où Jean Valjean était enfermé.

Lecture du texte

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Doc. 1

Placeholder pour Adaptation au cinéma par Robert Hossein, 1982, avec Michel Bouquet (Javert).Adaptation au cinéma par Robert Hossein, 1982, avec Michel Bouquet (Javert).
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Adaptation au cinéma par Robert Hossein, 1982, avec Michel Bouquet (Javert).
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Doc. 2

Placeholder pour Affiche de l'adaptation au cinéma
de Jean-Paul Le Chanois, 1957Affiche de l'adaptation au cinéma
de Jean-Paul Le Chanois, 1957
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Affiche de l'adaptation au cinéma de Jean‑Paul Le Chanois, 1957.
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Supplément numérique

— Eh bien quoi ! se dit-il, de quoi est-ce que j'ai peur ? qu'est-ce que j'ai à songer comme cela ? Me voilà sauvé. Tout est fini. Je n'avais plus qu'une porte entr'ouverte par laquelle mon passé pouvait faire irruption dans ma vie ; cette porte, la voilà murée ! à jamais ! Ce Javert qui me trouble depuis si longtemps, ce redoutable instinct qui semblait m'avoir deviné, qui m'avait deviné, pardieu ! et qui me suivait partout, cet affreux chien de chasse toujours en arrêt sur moi, le voilà dérouté, occupé ailleurs, absolument dépisté ! Il est satisfait désormais, il me laissera tranquille, il tient son Jean Valjean ! Qui sait même, il est probable qu'il voudra quitter la ville ! Et tout cela s'est fait sans moi ! Et je n'y suis pour rien ! Ah çà, mais ! qu'est-ce qu'il y a de malheureux dans ceci ? [...] Après tout, s'il y a du mal pour quelqu'un, ce n'est aucunement de ma faute. C'est la providence qui a tout fait. C'est qu'elle veut cela apparemment ! Ai-je le droit de déranger ce qu'elle arrange ? Qu'est-ce que je demande à présent ? De quoi est-ce que je vais me mêler ? Cela ne me regarde pas. Comment ! je ne suis pas content ! Mais qu'est-ce qu'il me faut donc ? Le but auquel j'aspire depuis tant d'années, le songe de mes nuits, l'objet de mes prières au ciel, la sécurité, je l'atteins ! C'est Dieu qui le veut. Je n'ai rien à faire contre la volonté de Dieu. Et pourquoi Dieu le veut-il ? Pour que je continue ce que j'ai commencé, pour que je fasse le bien, pour que je sois un jour un grand et encourageant exemple, pour qu'il soit dit qu'il y a eu enfin un peu de bonheur attaché à cette pénitence que j'ai subie et à cette vertu où je suis revenu ! Vraiment je ne comprends pas pourquoi j'ai eu peur tantôt d'entrer chez ce brave curé et de tout lui raconter comme à un confesseur, et de lui demander conseil, c'est évidemment là ce qu'il m'aurait dit. C'est décidé, laissons aller les choses ! laissons faire le bon Dieu !
Il se parlait ainsi dans les profondeurs de sa conscience, penché sur ce qu'on pourrait appeler son propre abîme. Il se leva de sa chaise, et se mit à marcher dans la chambre. — Allons, dit-il, n'y pensons plus. Voilà une résolution prise ! — Mais il ne sentit aucune joie. Au contraire.
On n'empêche pas plus la pensée de revenir à une idée que la mer de revenir à un rivage. Pour le matelot, cela s'appelle la marée ; pour le coupable, cela s'appelle le remords. Dieu soulève l'âme comme l'océan. [...]
Il se demanda donc où il en était. Il s'interrogea sur cette « résolution prise ». Il se confessa à lui-même que tout ce qu'il venait d'arranger dans son esprit était monstrueux, que « laisser aller les choses, laisser faire le bon Dieu », c'était tout simplement horrible. Laisser s'accomplir cette méprise de la destinée et des hommes, ne pas l'empêcher, s'y prêter par son silence, ne rien faire enfin, c'était faire tout ! c'était le dernier degré de l'indignité hypocrite ! c'était un crime bas, lâche, sournois, abject, hideux ! [...] Il se demanda sévèrement ce qu'il avait entendu par ceci : « Mon but est atteint ! » Il se déclara que sa vie avait un but en effet. Mais quel but ? cacher son nom ? tromper la police ? Était-ce pour une chose si petite qu'il avait fait tout ce qu'il avait fait ? Est-ce qu'il n'avait pas un autre but, qui était le grand, qui était le vrai ? Sauver, non sa personne, mais son âme. Redevenir honnête et bon. Être un juste ! Est-ce que ce n'était pas là surtout, là uniquement, ce qu'il avait toujours voulu, ce que l'évêque lui avait ordonné  ? – Fermer la porte à son passé ? Mais il ne la fermait pas, grand Dieu ! Il la rouvrait en faisant une action infâme ! mais il redevenait un voleur, et le plus odieux des voleurs ! Il volait à un autre son existence, sa vie, sa paix, sa place au soleil ! il devenait un assassin ! il tuait, il tuait moralement un misérable homme, il lui infligeait cette affreuse mort vivante, cette mort à ciel ouvert, qu'on appelle le bagne ! Au contraire, se livrer, sauver cet homme frappé d'une si lugubre erreur, reprendre son nom, redevenir par devoir le forçat Jean Valjean, c'était là vraiment achever sa résurrection, et fermer à jamais l'enfer d'où il sortait ! Y retomber en apparence, c'était en sortir en réalité  ! Il fallait faire cela ! Il n'avait rien fait s'il ne faisait pas cela ! Toute sa vie était inutile, toute sa pénitence était perdue, et il n'y avait plus qu'à dire : à quoi bon ? Il sentait que l'évêque était là, que l'évêque était d'autant plus présent qu'il était mort, que l'évêque le regardait fixement, que désormais le maire Madeleine avec toutes ses vertus lui serait abominable, et que le galérien Jean Valjean serait admirable et pur devant lui. Que les hommes voyaient son masque, mais que l'évêque voyait sa face. Que les hommes voyaient sa vie, mais que l'évêque voyait sa conscience. Il fallait donc aller à Arras, délivrer le faux Jean Valjean, dénoncer le véritable ! Hélas ! c'était là. le plus grand des sacrifices, la plus poignante des victoires, le dernier pas à franchir mais il le fallait. Douloureuse destinée ! Il n'entrerait dans la sainteté aux yeux de Dieu que s'il rentrait dans l'infamie aux yeux des hommes !
– Eh bien, dit-il, prenons ce parti ! faisons notre devoir ! sauvons cet homme !
Victor Hugo
Les Misérables, tome I, livre 8, chapitre 3, 1862.

Lecture du texte

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Questionnement A

Compréhension

A-1. Qu'arrive‑t-il au père Fauchelevent ?
A-2. Pourquoi personne ne l'aide au début ?

Analyse et interprétation

A-3. a) Relevez le champ lexical de la vue.
A-3. b) Quel personnage est essentiellement décrit par son regard ? Pour quelle raison ?
A-4. Expliquez pourquoi M. Madeleine a hésité à agir.

Écriture

A-5. Développez ce récit en ajoutant le monologue intérieur (les pensées) de M. Madeleine aux lignes suivantes.
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Questionnement B

Compréhension

B-1. Résumez cet épisode en insistant sur le rôle joué par les principaux personnages.
B-2. Que veut dire M. Madeleine lorsqu'il demande « quelqu'un qui ait des reins et du cœur » ?

Analyse et interprétation

B-3. Comment le personnage de Javert est‑il présenté ? Quel champ lexical le montre ?
B-4. À quel dilemme M. Madeleine est-il confronté ?

Écriture

B-5. Écrivez une suite à cet extrait afin d'exprimer les pensées du protagoniste. M. Madeleine reviendra sur ses hésitations puis justifiera son choix.
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Question commune
Prolongement
Approfondissez l'étude du dilemme de Jean Valjean en écoutant l' et en répondant aux questions suivantes.
La scène se déroule quelques mois plus tard : Javert a dénoncé M. Madeleine comme étant Jean Valjean, ancien forçat recherché. Mais on lui a répondu que le vrai Jean Valjean était sur le point d'être condamné à perpétuité, dès le lendemain, à Arras.

6. Expliquez la figure de style présente dans le titre du chapitre : « Une tempête sous un crâne ».
7. Comment cet extrait fait-il écho au dilemme auquel M. Madeleine (Jean Valjean) était déjà confronté dans l'épisode de la charrette ?
8. Selon vous, Jean Valjean a-t-il pris la bonne décision ?
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