Français 4e - 2022

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Questionnement 1 : Dire l'amour
Ch. 1
Comment dire les nuances de l'amour ?
Ch. 2
Roméo et Juliette : une histoire d’amour mythique ?
Questionnement 2 : Individu et société : confrontations de valeurs ?
Ch. 3
Des valeurs en confrontation ?
Ch. 4
Le Cid entre amour, honneur et devoir ?
Ch. 5
Les Misérables : un roman réaliste ?
Questionnement 3 : La fiction pour interroger le réel
Ch. 6
« Un parricide » : le récit d’un drame social ?
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Ch. 8
Comment mieux informer et s’informer ?
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Ch. 9
La ville, un personnage de roman ?
Ch. 10
Comment la science-fiction imagine-t-elle la ville ?
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Chapitre 7
Texte et image 1

« Nous nous asseyions tous autour de cette table »

15 professeurs ont participé à cette page
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En janvier 1918, alors qu'Irène a 15 ans, les Némirovsky fuient la révolution russe et trouvent refuge en Finlande, dans un petit village. Pour s'occuper lors des longues soirées d'hiver, on joue aux cartes mais on organise aussi des séances de spiritisme. La nouvelle que vous allez lire est inspirée de cette expérience.

En Finlande, pendant la révolution de 19181, nous étions quelques garçons et jeunes filles qui nous amusions, le soir venu, à faire tourner les tables. Nous habitions en pleine forêt, et c'était l'hiver : là-bas, l'été ne dure que trois mois. Or, dès que le crépuscule tombait, les sentiers de la forêt devenaient dangereux : les rebelles fuyards se cachaient derrière les arbres, dans les ravines pleines de neige, et les soldats de l'armée adverse les poursuivaient, les traquant de taillis en taillis. Des coups de feu étaient échangés, et si une balle perdue touchait un voyageur russe2 qui s'était réfugié dans ce pays, loin de sa révolution à lui... eh bien ! nous n'avions pas de consul3 pour nous défendre ou avertir notre famille d'un trépas4 prématuré.
Dans ce village, nous formions une petite colonie russe qui vivait, tant bien que mal, dans une vieille maison de bois, une pension de famille, ancienne, délabrée, formée de chambres vastes et noires et de grands salons vides. L'un d'entre eux avait été réservé à la jeunesse ; nos parents jouaient au bridge ou au whist5 dans les pièces voisines.
L'électricité avait été coupée dès le mois de novembre ; on nous accordait six bougies par soirée : quatre éclairaient les tables des joueurs, deux la nôtre. Imaginez-vous une pièce immense, basse de plafond, avec des fenêtres en forme de corbeilles, sans rideaux ni volets, les vitres couvertes de glace ; il y avait un piano dans un coin, sous une housse de coutil6 gris, un miroir au mur dans un grand cadre de bois, un placard où quelques tomes dépareillés de Balzac voisinaient avec des pots de confiture, hélas, vides pour la plupart, et, enfin, au milieu de la pièce, un guéridon7.
Nous nous asseyions tous autour de cette table ; les deux bougies étaient fichées dans des bouteilles. Comment décrire le silence de ces nuits du Nord, sans un souffle de vent, sans un gémissement de roues, sans un cri joyeux sur un chemin, sans un appel, sans un rire ? Parfois seulement le sec et léger claquement d'un coup de feu dans la forêt ou les pleurs d'un enfant réveillé dans les chambres du haut. Alors, on entendait la mère jeter les cartes et courir vers l'escalier, et le bruit de sa longue robe se perdre dans les couloirs. Ils étaient interminables, glacés, sinistres, ces couloirs. À l'ordinaire, nous nous arrangions pour monter chez nous tous ensemble, tous à la fois ; nous les traversions en groupe, en riant, en chantant, le cœur étreint d'effroi.
Je ne sais si l'état nerveux dans lequel nous nous trouvions en était la cause, ou si ce fut l'œuvre de mauvais plaisants, mais jamais je ne vis tables plus légères, plus facilement cabrées8 sous nos mains, jetées d'un mur à un autre, tanguant comme une barque sous un vent de tempête, faisant enfin un tel tapage que nos parents venaient nous supplier de trouver un autre amusement. Ils disaient que les chocs de cette maudite table et le bruit des coups de 40 fusil étaient vraiment plus qu'ils ne pouvaient supporter et que la vieillesse méritait des égards9.
À suivre...
Irène Némirovsky
« Magie », L'Intransigeant, 1938, Les Vierges et autres nouvelles, © Éditions Denoël, 2009.

1. La Finlande obtient son indépendance de la Russie en 1917, mais en 1918 une guerre civile éclate entre les « rouges » soutenus par la Russie soviétique et les « blancs » soutenus par le Sénat finlandais.
2. Un Russe « blanc » fuyant la révolution bolchévique, comme la famille d'Irène.
3. Représentant diplomatique (sous l'ambassadeur).
4. Une mort.
5. Jeux de cartes.
6. Tissu épais.
7. Petite table, souvent ronde, avec un pied central unique.
8. Dressées, penchées.
9. Du respect.

Lecture du texte

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Irène Némirovsky

 (1903-1942)
Irène Némirovsky (1903-1942) est née en Russie, mais elle reçoit une éducation française. Quand éclate la révolution de 1917, sa famille se réfugie pendant un an en Finlande, puis s'installe à Paris. Ses romans et nouvelles connaissent un grand succès, puis tombent dans l'oubli après la mort de l'autrice à Auschwitz-Birkenau. Son œuvre n'a été redécouverte qu'au début des années 2000.
Placeholder pour Irène NémirovskyIrène Némirovsky
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Éclairage

Le spiritisme

Pratique qui consiste à communiquer avec les « esprits », notamment par l'intermédiaire d'une table sur laquelle on place ses mains pour ressentir des mouvements : les paroles des esprits. Cette pratique était très à la mode au XIXe siècle. Des romantiques comme Edgar Allan Poe ou Victor Hugo en étaient de fervents adeptes.
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Écoute

Quelle bande-son (musique, bruits) pourrait accompagner la lecture de ce texte ?
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Placeholder pour Harald Oskar Sohlberg, Nuit d'hiver à Rondane, 1914Harald Oskar Sohlberg, Nuit d'hiver à Rondane, 1914
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Harald Oskar Sohlberg, Nuit d'hiver à Rondane, 1914, huile sur toile, 180,5 × 160 cm (Galerie nationale d'Oslo, Norvège).
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Questionnement A

Compréhension

A-1. Présentez ce que vous savez de la narratrice : origine, âge, lieu et conditions de vie, etc.
A-2. Résumez l'extrait en insistant sur la manière dont le groupe de jeunes occupe ses soirées.

Analyse et interprétation

A-3. Selon vous, quelles sont les raisons qui poussent ces jeunes à faire des séances de spiritisme ?
A-4. Quel est cet « état nerveux » dont parle la narratrice ?
A-5. Image Quel paragraphe du texte correspond le mieux au tableau d'Harald Sohlberg ? Justifiez votre réponse en citant les éléments du texte.

Écriture

A-6. Un soir, vous avez été enfermé(e) seul(e), par erreur, dans votre collège. Décrivez la nuit que vous passez en restituant un sentiment de peur qui monte peu à peu. (25 lignes)
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Questionnement B

Compréhension

B-1. a) Quel est le cadre de cette histoire ?
B-1. b) En quoi est-il propice aux phénomènes étranges ?
B-2. Résumez l'extrait en soulignant la manière dont les parents réagissent à l'activité favorite de leurs enfants le soir.

Analyse et interprétation

B-3. Relevez tous les éléments qui contribuent à créer une atmosphère inquiétante.
B-4. a) Relevez un paradoxe à cette ligne.
B-4. b) Comment le comprenez-vous ?
B-5. Image a) Quel sentiment se dégage de ce tableau ? Justifiez votre réponse.
B-5. b) À quel passage du texte pourrait-il fait écho ?

Écriture

B-6. Vous faites partie des jeunes qui vivent dans cette grande maison. Écrivez une lettre à votre tante, dans laquelle vous décrivez vos conditions de vie difficiles. (40 lignes)
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Question commune
À partir de ce que vous avez retenu de l'activité , relevez tout ce qui rattache ce début de nouvelle au fantastique.
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