Dans le métro, un homme dit à un autre : « Alors vous avez vu que Paris est ville ouverte ? – Ville ouverte ? Qu'est-ce-que ça veut dire ? – Eh bien, qu'elle ne se défendra pas ; l'ennemi entrera librement. [...] Comment ? Alors les Allemands peuvent venir comme ils veulent ? – Bien sûr. Vous ne l'avez pas vu ? C'est affiché, signé du gouverneur de Paris. Ils seront là ce soir ou demain. [...] Quel cortège ! [...] Dire que nous avons vu tant de photos, tant de films de réfugiés sur les routes... mais rien, non rien n'approchait de cela. Non seulement la route, mais les bas-côtés sont occupés et le trottoir. Gros camions commerciaux ; camions militaires, attelages paysans, voitures de tourisme de tous modèles, de tous âges, et motocyclistes, et bicyclistes, et une collection de poussettes les plus invraisemblables ; charrettes à bras traînées par l'homme et supportant le mobilier, les enfants, la grand-mère les jambes ballantes [...] – mais surtout des piétons chargés, écrasés sous les valises, les ballots, les sacs et se frayant un passage à travers les véhicules, foule tendue, qui ne pense qu'à avancer, qu'à fuir, la tête basse, et, chose impressionnante, complètement silencieuse.