HIPPOLYTE. – Je sais ce que vous vouliez dire. Vous avez raison. Les femmes me trouvent plus séduisant depuis que j'ai engraissé. Elles pensent que je dois avoir un secret. (Il se mouche dans sa chaussette et la balance.) Je suis gras. Je suis dégoûtant. Je suis lamentable. Mais on me baise beaucoup. Donc... ? (Phèdre ne bronche pas.) Allez, Mère1, creusez-vous la tête.
PHÈDRE. – Ne m'appelle pas comme ça.
HIPPOLYTE. – Donc, c'est que j'assure comme une bête. Oui ? (Phèdre ne bronche pas.) Pourquoi ne devrais-je pas vous appeler mère, Mère ? Je croyais que c'était la formule obligée. Une grande et heureuse famille. La seule famille royale qui ait jamais eu du succès. Ou trouvez-vous que ça vous vieillit ? (Phèdre ne bronche pas.) Me détestez-vous maintenant ?
PHÈDRE. – Pourquoi veux-tu que je te déteste ?
HIPPOLYTE. – Je ne veux rien. Mais ça finira par arriver.
PHÈDRE. – Jamais.
HIPPOLYTE. – Ils en sont tous arrivés là.
PHÈDRE. – Pas moi. (Ils se dévisagent. Hippolyte détourne les yeux.)
HIPPOLYTE. – Pourquoi n'allez-vous pas parler à Strophe2, c'est votre enfant, moi pas. Pourquoi tant vous soucier de moi ?
PHÈDRE. – Je t'aime. (Silence)
HIPPOLYTE. – Pourquoi ?
PHÈDRE. – Tu es difficile. Caractériel, cynique, amer, gras, décadent, gâté. Tu restes au lit toute la journée et planté devant la télé toute la nuit, te traînes dans cette maison avec fracas les yeux bouffis de sommeil et sans une pensée pour personne. Tu souffres. Je t'adore.
Phèdre est la belle-mère d'Hippolyte. Elle est mariée à son père, le roi Thésée.