Français 4e - 2022

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Chapitre 3
Texte et image 5

« Je détournais les yeux »

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L'autrice de ce récit autobiographique est issue d'un milieu modeste : ses parents tiennent un café-épicerie dans une petite ville de Normandie. Alors qu'elle est lycéenne boursière dans un pensionnat catholique, elle découvre un milieu social très différent de son milieu d'origine, et en adopte peu à peu les codes.

Ma mère [...] a cessé d'être mon modèle. Je suis devenue sensible à l'image féminine que je rencontrais dans L'Écho de la mode1 et dont se rapprochaient les mères de mes camarades petites-bourgeoises du pensionnat : minces, discrètes, sachant cuisiner et appelant leur fille « ma chérie ». Je trouvais ma mère voyante. Je détournais les yeux quand elle débouchait la bouteille en la maintenant entre les jambes. J'avais honte de sa manière brusque de parler et de se comporter, d'autant plus vivement que je sentais combien je lui ressemblais. Je lui faisais grief2 d'être ce que, en train d'émigrer dans un milieu différent, je cherchais à ne plus paraître. Et je découvrais qu'entre le désir de se cultiver et le fait de l'être, il y avait un gouffre. Ma mère avait besoin du dictionnaire pour dire qui était Van Gogh, des grands écrivains, elle ne connaissait que le nom. Elle ignorait le fonctionnement de mes études. Je l'avais trop admirée pour ne pas lui en vouloir, plus qu'à mon père, de ne pas pouvoir m'accompagner, de me laisser sans secours dans le monde de l'école et des amis avec salon-bibliothèque, n'ayant à m'offrir pour bagage que son inquiétude et sa suspicion, « avec qui étais-tu, est-ce que tu travailles au moins ».
– Nous nous adressions l'une à l'autre sur un ton de chamaillerie en toutes circonstances. J'opposais le silence à ses tentatives pour maintenir l'ancienne complicité (« on peut tout dire à sa mère ») désormais impossible : si je lui parlais de désirs qui n'avaient pas trait3 aux études (voyages, sports, surboums4), ou discutais de politique (c'était la guerre d'Algérie), elle m'écoutait d'abord avec plaisir, heureuse que je la prenne pour confidente, et d'un seul coup, avec violence : « Cesse de te monter la tête avec tout ça, l'école en premier. »
Je me suis mise à mépriser les conventions sociales, les pratiques religieuses, l'argent. Je recopiais des poèmes de Rimbaud et de Prévert, je collais des photos de James Dean5 sur la couverture des cahiers, j'écoutais La Mauvaise Réputation de Brassens6, je m'ennuyais. Je vivais ma révolte adolescente sur le mode romantique comme si mes parents avaient été des bourgeois. Je m'identifiais aux artistes incompris. Pour ma mère, se révolter n'avait eu qu'une seule signification, refuser la pauvreté, et qu'une seule forme, travailler, gagner de l'argent et devenir aussi bien que les autres. D'où ce reproche amer que je ne comprenais pas plus qu'elle ne comprenait mon attitude : « Si on t'avait fichue en usine à douze ans, tu ne serais pas comme ça. Tu ne connais pas ton bonheur. » Et encore, souvent, cette réflexion de colère à mon égard : « Ça va au pensionnat et ça ne vaut pas plus cher que d'autres. »
À certains moments, elle avait, dans sa fille en face d'elle, une ennemie de classe7.
Annie Ernaux
Une femme, 1988, © Éditions Gallimard.

1. Magazine de mode.
2. Je lui reprochais.
3. Qui n'étaient pas liés.
4. Fêtes, soirées.
5. Acteur américain célèbre pour sa beauté et son destin tragique.
6. Chanteur français anticonformiste, très populaire dans les années 1950-1970.
7. L'autrice parle ici de classe sociale.

Lecture du texte

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Annie Ernaux 

(née en 1940)
Annie Ernaux s'est fait connaître avec ses récits autobiographiques dans lesquels elle évoque notamment le changement de classe sociale qu'elle a vécu en faisant des études.
Placeholder pour Portrait d'Annie ErnauxPortrait d'Annie Ernaux
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Lexique

Débouchait

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n°36, 5 septembre 1954 (collection privée).Couverture du magazine Le Petit Écho de la mode,
n°36, 5 septembre 1954 (collection privée).
Couverture du magazine Le Petit Écho de la mode, n° 36, 5 septembre 1954 (collection privée).
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Questionnement A

Compréhension

A-1. Résumez l'extrait en expliquant de quelle manière la fille a changé depuis qu'elle est entrée au pensionnat.

Analyse et interprétation

A-2. Pourquoi la fille a-t-elle honte de sa mère ? Expliquez en donnant des exemples du texte.
A-3. Pourquoi en veut-elle à sa mère ?
A-4. Que reproche la mère à sa fille dans la deuxième partie de l'extrait ? Quelle valeur défend-elle ?

Écriture

A-5. Au pensionnat, la fille écrit à sa mère pour s'excuser de la manière dont elle se comporte avec elle depuis quelque temps. Imaginez ce qu'elle lui dit.
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Questionnement B

Compréhension

B-1. Résumez l'extrait en expliquant pourquoi la mère et fille se comprennent moins bien qu'avant.

Analyse et interprétation

B-2. « Je trouvais ma mère voyante. » Que veut dire la narratrice ?
B-3. a) Contre quoi et de quelle manière la mère s'est-elle révoltée au cours de sa vie ?
B-3. b) Contre quoi et de quelle manière la fille se révolte-t-elle dans cet extrait ?

Écriture

B-4. Lisez cet . Imaginez ensuite une discussion qu'elle aurait avec ses parents. Chaque personnage défendra les valeurs qui sont importantes à ses yeux.
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Question commune
Selon vous, les valeurs qui nous animent sont-elles liées au milieu social auquel on appartient ? Change-t-on de valeurs en changeant de milieu social ? Débattez entre vous.
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