Français 4e - 2022

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Chapitre 3
Texte et image 2

« Elle souffrait sans cesse »

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Voici l'incipit de la célèbre nouvelle intitulée « La Parure ».

C'était une de ces jolies et charmantes filles, nées, comme par une erreur du destin, dans une famille d'employés. Elle n'avait pas de dot1, pas d'espérances, aucun moyen d'être connue, comprise, aimée, épousée par un homme riche et distingué ; et elle se laissa marier avec un petit commis2 du ministère de l'instruction publique.
[…] Elle souffrait sans cesse, se sentant née pour toutes les délicatesses et tous les luxes. Elle souffrait de la pauvreté de son logement, de la misère des murs, de l'usure des sièges, de la laideur des étoffes. Toutes ces choses, dont une autre femme de sa caste3 ne se serait même pas aperçue, la torturaient et l'indignaient. La vue de la petite Bretonne4 qui faisait son humble ménage éveillait en elle des regrets désolés et des rêves éperdus. Elle songeait aux antichambres5 muettes, capitonnées6 avec des tentures orientales, éclairées par de hautes torchères7 de bronze, et aux deux grands valets en culotte courte qui dorment dans les larges fauteuils, assoupis par la chaleur lourde du calorifère8. Elle songeait aux grands salons vêtus de soie ancienne, aux meubles fins portant des bibelots9 inestimables, et aux petits salons coquets10, parfumés, faits pour la causerie de cinq heures avec les amis les plus intimes, les hommes connus et recherchés dont toutes les femmes envient et désirent l'attention.
Quand elle s'asseyait, pour dîner, devant la table ronde couverte d'une nappe de trois jours, en face de son mari qui découvrait la soupière en déclarant d'un air enchanté : « Ah ! le bon pot-au-feu ! je ne sais rien de meilleur que cela… », elle songeait aux dîners fins, aux argenteries reluisantes, aux tapisseries peuplant les murailles de personnages anciens et d'oiseaux étranges au milieu d'une forêt de féerie ; elle songeait aux plats exquis servis en des vaisselles merveilleuses, aux galanteries chuchotées et écoutées avec un sourire de sphinx, tout en mangeant la chair rose d'une truite ou des ailes de gélinotte11.
Elle n'avait pas de toilettes12, pas de bijoux, rien. Et elle n'aimait que cela ; elle se sentait faite pour cela. Elle eût tant désiré plaire, être enviée, être séduisante et recherchée.
Elle avait une amie riche, une camarade de couvent qu'elle ne voulait plus aller voir, tant elle souffrait en revenant. Et elle pleurait pendant des jours entiers, de chagrin, de regret, de désespoir et de détresse.
Guy de Maupassant
« La Parure », Contes du jour et de la nuit, 1885.

1. Ensemble de biens qu'une femme apporte en se mariant.
2. Employé.
3. Condition, classe sociale.
4. Leur employée de maison.
5. Pièce d'entrée qui donne accès aux autres pièces.
6. Recouvertes.
7. Chandeliers.
8. Appareil produisant et diffusant de la chaleur.
9. Petits objets de décoration.
10. Élégants.
11. Sorte de perdrix, dont la chair est très délicate.
12. De beaux habits.

Lecture du texte

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Guy de Maupassant

(1850-1893)
Guy de Maupassant est écrivain et journaliste. Disciple de Gustave Flaubert et ami d'Émile Zola, il a écrit des romans réalistes (comme Bel-Ami, voir ) et des centaines de nouvelles fantastiques ou inspirées de faits divers.
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Lexique

Calorifère

Comment ce mot est-il formé ? Que signifie son suffixe ? Trouvez deux autres noms communs partageant le même suffixe.
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mains, début du XX e siècle, huile sur toile,
50,8 × 40,6 cm (collection privée).Sylvia Gosse, Femme se réchauffant les
mains, début du XX e siècle, huile sur toile,
50,8 × 40,6 cm (collection privée).
Sylvia Gosse, Femme se réchauffant les mains, début du XXe siècle, huile sur toile, 50,8 × 40,6 cm (collection privée).
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Questionnement A

Compréhension

A-1. Résumez l'extrait en expliquant pourquoi cette femme n'est pas heureuse.

Analyse et interprétation

A-2. Expliquez le sens de l'expression « comme par une erreur du destin » en vous référant à la suite du texte.
A-3. a) Quel verbe est répété au début du deuxième paragraphe ? Lequel est répété dans la suite du texte ?
A-3. b) Que révèlent-ils sur le caractère de la jeune femme ?

Écriture

A-4. Imaginez le dialogue entre la femme désabusée et son mari « enchanté », à table, devant le pot-au-feu. (30 lignes)
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Questionnement B

Compréhension

B-1. Décrivez la situation sociale du couple et expliquez comment chacun d'eux vit cette situation en vous appuyant sur des exemples du texte.

Analyse et interprétation

B-2. Dans le deuxième paragraphe, quelle est utilisée pour opposer deux mondes ?
B-3. Comment le narrateur amplifie-t-il l'impression de souffrance de la femme ? Relevez deux procédés.

Écriture

B-4. La « petite Bretonne » rencontre au marché la domestique d'un couple voisin. Imaginez un dialogue où elles se moquent de leurs maîtresses. (30 lignes)
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Question commune
Lisez la et comparez-la à l'extrait.
a) Nommez le sentiment qui anime les deux jeunes femmes et donnez-en la cause.
b) Montrez toutefois qu'elles sont dans des situations très différentes.
c) Que critiquent ces deux textes, selon vous ?
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Suppléments numériques

  • Retrouvez la version intégrale de .
  • Lisez la nouvelle d'Émile Zola intitulée « À quoi rêvent les pauvres filles ? ».
Elle a travaillé pendant douze heures. Elle a gagné quinze sous. Le soir, elle rentre à son logement, le long des trottoirs blancs de gelée, grelottante sous sa mince écharpe noire, maigre et furtive, avec cet air craintif des pauvres bêtes abandonnées.
Et, comme ses entrailles crient famine, elle achète quelque reste de charcuterie à bas prix, qu'elle emporte à la main, plié dans un lambeau de journal. Puis essoufflée, elle gravit ses six étages.
En haut, le grenier est désolé. Un bout de chandelle éclaire cette misère. Pas de feu. Le vent passe sous la porte, si aigu, qu'il effare la flamme de la chandelle. Un lit, une table, une chaise. Il fait si froid que l'eau du pot à eau a gelé.
Elle se hâte ; elle se réchauffera peut-être un peu dans le lit, sous le paquet de ses vêtements qu'elle entasse chaque soir à ses pieds. Vivement elle s'est assise devant la petite table ; elle a tiré un morceau de pain d'une armoire, elle mange sa charcuterie de cet air glouton et indifférent des affamés. Quand elle a soif, il lui faut casser la glace du pot à eau.
C'est une enfant de dix-huit ans au plus. Pour avoir moins froid, elle n'a retiré ni son châle ni son bonnet. Elle mange chez elle toute vêtue, en cachant par moments ses mains que le vent bleuit. Si elle pouvait sourire, elle serait charmante ; ses lèvres délicates, ses yeux d'un gris tendre auraient une douceur exquise. Mais la souffrance a pincé sa bouche, et mis une dureté morne dans son regard. Elle a le masque rigide et menaçant des misérables.
Elle regarde devant elle, vaguement, le cerveau vide, mangeant comme un animal qui se dépêche. Puis ses yeux s'arrêtent sur le lambeau de journal, taché de graisse, qui lui sert d'assiette. Elle lit, elle oublie d'achever son pain.
Il y a eu bal aux Tuileries, et elle apprend qu'on y a consommé une quantité prodigieuse de vin et de mets : neuf mille bouteilles de champagne, trois mille gâteaux, six cents kilogrammes de viande et le reste. Elle a un sourire singulier, elle se dit que ces gens doivent être bien gras.
Mais elle est femme, elle s'arrête davantage aux descriptions des toilettes. Elle lit :
« Madame de Metternich, robe blanche, avec ceinture violet foncé. Une rivière de diamants soutenait un adorable fouillis de perles et de diamants. »
Sa face est devenue plus dure. Pourquoi les autres ont-elles des rivières de diamants, lorsqu'elle n'a pas une robe chaude à se mettre ?
Elle continue :
« L'impératrice en robe vert tendre, recouverte d'une demi-jupe en tulle bouillonnant blanc, à lamé d'argent, garnie au bas et au corsage de martre zibeline. Dans les cheveux, des fleurs en boule de neige et un simple bandeau de diamants. Autour du cou, un velours noir sur lequel est appliquée une grecque en diamants admirables. »
Toujours des diamants, et ici des diamants à enrichir cent familles. L'enfant ne lit plus. Elle s'est renversée sur sa chaise, elle songe.
Des pensées mauvaises passent dans ses yeux gris. Elle ne sent plus le froid, elle est tout entière à la tentation du mal.
Et quand elle s'éveille de son rêve, elle a un grand frisson, et jetant un regard autour de sa chambre, elle murmure :
« À quoi bon ? – À quoi bon travailler ? Je veux des diamants. »
Demain elle en aura.
Émile Zola
« À quoi rêvent les pauvres filles ? », 1870.

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