Ceux qui n'ont inventé ni la poudre ni la boussole
Ceux qui n'ont jamais su dompter la vapeur ni l'électricité
Ceux qui n'ont exploré ni les mers ni le ciel
Mais ils savent en ses moindres recoins le pays de souffrance
Ceux qui n'ont connu de voyages que de déracinements
Ceux qui se sont assouplis aux agenouillements
Ceux qu'on domestiqua et christianisa
Ceux qu'on
inocula d'
abâtardissement
Tam-tams de mains vides
Tam-tams
inanes de plaies sonores
Tam-tams
burlesques de trahison
tabide
Ma négritude n'est pas une
taie d'eau morte sur l'œil mort de la terre
ma négritude n'est ni une tour ni une cathédrale
elle plonge dans la chair rouge du sol
elle plonge dans la chair ardente du ciel
elle troue l'accablement opaque de sa droite patience.
Eia pour
le Kaïlcédrat royal !
Eia pour ceux qui n'ont jamais rien inventé
pour ceux qui n'ont jamais rien exploré
pour ceux qui n'ont jamais rien dompté
mais ils s'abandonnent, saisis, à l'essence de toute chose
ignorants des surfaces mais saisis par le mouvement de toute chose
insoucieux de dompter, mais jouant le jeu du monde
véritablement les fils aînés du monde
poreux à tous les souffles du monde
aire fraternelle de tous les souffles du monde
lit sans
drain de toutes les eaux du monde
étincelle du feu sacré du monde
chair de la chair du monde palpitant du mouvement même du monde !