Philosophie Terminale

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SECTION 1 • Le roseau pensant
Ch. 1
La conscience
Ch. 2
L’inconscient
Ch. 3
Le temps
Ch. 4
La raison
Ch. 5
La vérité
SECTION 2 • Le fils de Prométhée
Ch. 6
La science
Ch. 7
La technique
Ch. 9
Le travail
SECTION 3 • L’animal politique
Ch. 10
La nature
Ch. 11
Le langage
Ch. 12
L’État
Ch. 13
Le devoir
SECTION 4 • L’ami de la sagesse
Ch. 14
La justice
Ch. 15
La religion
Ch. 16
La liberté
Ch. 17
Le bonheur
Fiches méthode
Biographies
Annexes
Chapitre 8
Réflexion 3

Quelle est la force qui pousse l'artiste à créer ?

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Camus - XXe siècle

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Texte 7
Servir ceux qui subissent l'histoire

L'art a une mission morale et politique ; il doit s'engager auprès des hommes et jamais au service des idéologies ou des pouvoirs, ce qui distingue l'engagement de la propagande.

 Je ne puis vivre personnellement sans mon art. Mais je n'ai jamais placé cet art au‑dessus de tout. S'il m'est nécessaire au contraire, c'est qu'il ne se sépare de personne et me permet de vivre, tel que je suis, au niveau de tous. L'art n'est pas à mes yeux une réjouissance solitairea. Il est un moyen d'émouvoir le plus grand nombre d'hommes en leur offrant une image privilégiée des souffrances et des joies communes. Il oblige donc l'artiste à ne pas s'isoler ; il le soumet à la vérité la plus humble et la plus universelle. Et celui qui, souvent, a choisi son destin d'artiste parce qu'il se sentait différent apprend bien vite qu'il ne nourrira son art, et sa différence, qu'en avouant sa ressemblance avec tous. L'artiste se forge dans cet aller‑retour perpétuel de lui aux autres, à mi‑chemin de la beauté dont il ne peut se passer et de la communauté à laquelle il ne peut s'arracher. C'est pourquoi les vrais artistes ne méprisent rien ; ils s'obligent à comprendre au lieu de juger. Et, s'ils ont un parti à prendre en ce monde, ce ne peut être que celui d'une société où, selon le grand mot de Nietzsche, ne régnera plus le juge, mais le créateur, qu'il soit travailleur ou intellectuel.

 Le rôle de l'écrivain, du même coup, ne se sépare pas de devoirs difficiles. Par définition, il ne peut se mettre aujourd'hui au service de ceux qui font l'histoire : il est au service de ceux qui la subissentb. Ou, sinon, le voici seul et privé de son art. Toutes les armées de la tyrannie avec leurs millions d'hommes ne l'enlèveront pas à la solitude, même et surtout s'il consent à prendre leur pas. Mais le silence d'un prisonnier inconnu, abandonné aux humiliations à l'autre bout du monde, suffit à retirer l'écrivain de l'exil, chaque fois, du moins, qu'il parvient, au milieu des privilèges de la liberté, à ne pas oublier ce silence et à le faire retentir par les moyens de l'art.

 Aucun de nous n'est assez grand pour une pareille vocation. Mais, dans toutes les circonstances de sa vie, obscur ou provisoirement célèbre, jeté dans les fers de la tyrannie ou libre pour un temps de s'exprimer, l'écrivain peut retrouver le sentiment d'une communauté vivante qui le justifiera, à la seule condition qu'il accepte, autant qu'il peut, les deux charges qui font la grandeur de son métier : le service de la vérité et celui de la liberté. Puisque sa vocation est de réunir le plus grand nombre d'hommes possible, elle ne peut s'accommoder du mensonge et de la servitude qui, là où ils règnent, font proliférer les solitudes. Quelles que soient nos infirmités personnelles, la noblesse de notre métier s'enracinera toujours dans deux engagements difficiles à maintenir : le refus de mentir sur ce que l'on sait et la résistance à l'oppression.

 Pendant plus de vingt ans d'une histoire démentielle, perdu sans secours, comme tous les hommes de mon âge, dans les convulsions du temps, j'ai été soutenu ainsi : par le sentiment obscur qu'écrire était aujourd'hui un honneur, parce que cet acte obligeait, et obligeait à ne pas écrire seulement. Il m'obligeait particulièrement à porter, tel que j'étais et selon mes forces, avec tous ceux qui vivaient la même histoire, le malheur et l'espérance que nous partagions. Ces hommes, nés au début de la première guerre mondiale, qui ont eu vingt ans au moment où s'installaient à la fois le pouvoir hitlérien et les premiers procès révolutionnairesc, qui furent confrontés ensuite, pour parfaire leur éducation, à la guerre d'Espagne, à la deuxième guerre mondiale, à l'univers concentrationnaire, à l'Europe de la torture et des prisons, doivent aujourd'hui élever leurs fils et leurs oeuvres dans un monde menacé de destruction nucléaire.
Albert Camus
discours de réception du prix Nobel de littérature, 10 décembre 1957.

Aide à la lecture

a. La dimension ludique ou distractive de l'art n'est pas l'objectif de l'artiste.
b. La notion d'engagement est essentiel à l'acte artistique. Ce dernier a un sens moral et se place donc du côté des victimes et non des pouvoirs.
c. Camus s'engagera toujours pour les hommes même quand il faut, pour cela, se battre contre les idéologies et les idées abstraites. Il s'insurge contre les répressions à Berlin‑Est en 1953 et contre l'écrasement soviétique de la révolte de Budapest en 1957. Il sera également aux côtés des réfugiés du franquisme.
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Question

Est‑ce que l'idée d'une mission propre à l'artiste vous semble justifiée ?
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Commentaire

Camus est contemporain de la montée des grandes idéologies et des deux guerres mondiales. Beaucoup d'artistes vivent alors comme un devoir de s'engager pour les grandes causes du XXe siècle. L'écrivain expose ici sa vision de la mission de l'artiste. Si ce dernier peut la remplir, c'est qu'il dispose d'une acuité que les autres hommes n'ont pas. Cette puissance de voir et de montrer l'implicite rapproche le philosophe et l'artiste. L'approche de Camus peut être comprise en s'appuyant sur ce que dit Bergson dans la Conférence de Madrid sur l'âme humaine : « La philosophie n'est pas l'art, mais elle a avec l'art de profondes affinités. Qu'est-ce que l'artiste ? C'est un homme qui voit mieux que les autres, car il voit la réalité nue et sans voiles. […] Mais celui qui mettra le feu à toutes ces conventions, celui qui méprisera l'usage pratique et les commodités de la vie et s'efforcera de voir directement la réalité même, sans rien interposer entre elle et lui, celui‑là sera un artiste. Mais ce sera aussi un philosophe, avec cette différence que la philosophie s'adresse moins aux objets extérieurs qu'à la vie intérieure de l'âme ».

L'art poursuit donc le même objectif que la philosophie – éveiller les consciences – mais il le fait par d'autres moyens. Si le philosophe est essentiellement un créateur de concepts, l'artiste est un créateur de formes. L'artiste ne cherche pourtant pas la forme ou la nouveauté pour ellemême. Sa quête est une lecture directe et perspicace du réel.
Schéma Art
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Débat

La question de l'engagement


L'art semble avoir deux objectifs distincts : une utilité sociale et politique d'une part ; une recherche désintéressée d'autre part. Ainsi, si Camus expose la nécessité pour l'artiste de s'engager, Matisse peut déclarer : « Je suis un artiste violemment dégagé ».
  • Question : La valeur d'un art dépend-elle des objectifs sociaux ou moraux qu'il se fixe ?
  • Objectif : Mesurer que le degré d'engagement est une valorisation, parmi d'autres, de l'art. Il est possible de faire chercher aux élèves des exemples qui illustrent l'engagement ou le dégagement des artistes.
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Texte 8
La nature inspire le génie

Texte fondateur

La nature, dans l'homme de génie, produit une originalité exemplaire. Le créateur génial est donc un simple outil que la nature utilise.

 Il est facile maintenant de comprendre ce qui suit :

 1. Le génie est le talent de produire ce dont on ne peut donner de règle déterminée, et non pas l'habileté qu'on peut montrer en faisant ce qu'on peut apprendre suivant une règle ; par conséquent, l'originalité est sa première qualité.

 2. Comme il peut y avoir des extravagances originales, ses productions doivent être des modèles, elles doivent être exemplaires et, par conséquent, originales ellesmêmes ; elles doivent pouvoir être proposées à l'imitation, c'est‑à‑dire servir de mesure ou de règle d'appréciation.

 3. Il ne peut lui‑même décrire ou montrer scientifiquement comment il accomplit ses productionsa, mais il donne la règle par une inspiration de la nature et ainsi l'auteur d'une production, en étant redevable à son génie, ne sait pas lui‑même comment les idées s'en trouvent en lui ; il n'est pas en son pouvoir d'en former de semblables à son gré et méthodiquement, et de communiquer aux autres des préceptes qui les mettent en état d'accomplir de semblables productions.
Emmanuel Kant
Critique du jugement, 1790, trad. J. Barni.

Aide à la lecture

a. Le génie ne se produit pas en suivant un protocole méthodique car l'artiste génial est porteur d'une règle dont il n'est pas l'auteur. Ainsi, le génie ne se confond pas avec le talent.
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Kant - XVIIIe siècle

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Question

Qu'est‑ce qui fait du génie un être à part ?
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Texte 9
Le génie s'acquiert

Le génie s'acquiert par un travail opiniâtre, qui prend le temps du détail dans l'exigence du geste juste, sans volonté d'épater le public.

 La conscience de métier. – Ne venez surtout pas me parler de dons naturels, de talents innés ! On peut citer dans tous les domaines de grands hommes qui étaient peu doués. Mais la grandeur leur est venue, ils se sont faits « génies » (comme on dit), grâce à certaines qualités dont personne n'aime à trahir l'absence quand il en est conscient ; ils possédaient tous cette solide conscience artisanale qui commence par apprendre à parfaire les parties avant de se risquer à un grand travail d'ensemble ; ils prenaient leur temps parce qu'ils trouvaient plus de plaisir à la bonne facture du détail, de l'accessoire, qu'à l'effet produit par un tout éblouissant. Il est facile, par exemple, d'indiquer à quelqu'un la recette pour devenir bon nouvelliste, mais l'exécution en suppose des qualités sur lesquelles on passe en général en disant : « je n'ai pas assez de talent ».
Friedrich Nietzsche
Humain, trop humain, 1878, trad. A.-M. Desrousseaux, H. Albert.
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Nietzsche - XIXe siècle

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Repères

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Question

Le génie est‑il seulement un don ?
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Texte complémentaire
Le manuscrit témoigne

 La plupart des écrivains, les poètes surtout, préfèrent laisser entendre qu'ils composent dans une espèce de splendide frénésie, d'extatique intuition ; ils seraient littéralement glacés de terreur à l'idée de laisser le public jeter un coup d'oeil derrière la scène et voir les laborieux et incertains enfantements de la pensée, les vrais desseins compris seulement à la dernière minute, les innombrables éclairs d'idées qui n'atteignirent point la maturité de la pleine lumière, les imaginations pleinement mûries et rejetées pourtant par désespoir de les mettre en oeuvre, les choix et les rejets longuement pesés, les ratures et les additions si pénibles […] qui, dans quatre‑vingt‑dix‑neuf cas sur cent, forment les accessoires de l'histrion littéraire…
Edgar Poe
La philosophie de la composition, 1846, trad. R. Lalou, Éditions du Sagittaire, 1927.
Placeholder pour Manuscrit Marcel ProustManuscrit Marcel Proust
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Marcel Proust, À la recherche du temps perdu, manuscrit, 1906‑1922 (Bibliothèque nationale de France).
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Texte 10
Le génie : une fécondité inconsciente

Duchamp pense que les artistes sont mus par une force ; ils ne créent pas en pleine conscience mais sont aussi les observateurs de leur geste créateur.

 [Je] crois que l'artiste qui fait cette oeuvre, ne sait pas ce qu'il fait. Je veux dire par là : il sait ce qu'il fait physiquement, et même sa matière grise pense normalement, mais il n'est pas capable d'estimer le résultat esthétique. […] Il y a une chose profonde que l'artiste a produite sans le savoir. Et j'insiste là‑dessus parce que les artistes n'aiment pas qu'on leur dise ça. L'artiste aime bien croire qu'il est complètement conscient de ce qu'il fait, de pourquoi il le fait, de comment il le fait, et de la valeur intrinsèque de son œuvre. A ça, je ne crois pas du tout. Je crois sincèrement que le tableau est autant fait par le regardeur que par l'artiste.

 […] L'œuvre d'art n'a pas de valeur, aucune, d'ordre numérique ou d'ordre même moral. C'est une chose qui s'impose par sa présence, uniquement. Cette présence est telle qu'elle passe de siècle en siècle et est conservée comme une chose unique et qui donc n'a pas de prix.
Georges Charbonnier
Entretiens avec Marcel Duchamp, 1960, Éditions André Dimanche, 1994.
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Duchamp - XXe siècle

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Repères

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Question

L'artiste impose‑t‑il son œuvre ou bien son œuvre s'impose‑t‑elle à lui ?
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Activité

À partir du texte 8 et du texte 9, créez un tableau dans lequel vous indiquerez les thèses et les exemples des auteurs à propos de la notion d'inspiration.

KantNietzscheDuchamp
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Nietzsche - XIXe siècle

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Repères

  • Concept / Image / Métaphore
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Texte 11
Les deux forces créatrices

Texte fondateur

L'homme est poussé à créer pour libérer une tension entre Apollon et Dionysos. Dans la mythologie grecque, le dionysien affirme les forces les plus profondes, les plus violentes de la vie, au contraire de l'apollinien qui incarne la beauté formelle et l'harmonie. L'homme est créateur d'art pour pouvoir exprimer sa nature profonde, dionysiaque.

 Nous aurons fait un grand pas en esthétique lorsque nous serons parvenus non seulement à la conviction intellectuelle mais à la certitude intime que l'évolution de l'art est liée au dualisme de l'esprit apollinien et de l'esprit dionysiaque, de même que la génération dépend de la dualité des sexes, dont la lutte perpétuelle n'est coupée que d'éphémères réconciliations. Nous empruntons ces termes aux Grecs, lesquels ont déposé, pour qui les comprend, la profonde et secrète doctrine de leur vision esthétique non pas dans des concepts mais dans les figures précises de leurs dieux. À travers leurs deux divinités de l'art, Apollona et Dionysosb, nous comprenons que, dans le monde grec, il existe une violente opposition, non seulement sous le rapport de l'origine mais aussi sous celui de la fin, entre l'art du sculpteur, art apollinien, et l'art non sculptural de la musique, qui appartient à Dionysos. Ces deux inspirations si différentes suivent un chemin parallèle ; le plus souvent en conflit ouvert, elles se provoquent mutuellement à des productions toujours plus vigoureuses pour y perpétuer le conflit de leur opposition (que le terme commun d'art ne recouvre qu'en apparence), jusqu'à ce qu'enfin, par un miracle métaphysique de la « volonté » hellène, ils apparaissent unis et engendrent dans cette conjonction l'oeuvre d'art à la fois dionysiaque et apollinienne : la tragédie attique.

 Pour mieux comprendre cet antagonisme, imaginons‑le d'abord sous la forme des deux mondes esthétiques distincts du rêve et de l'ivresse, qui offrent, sous l'angle des phénomènes physiologiques, un écart analogue à l'opposition de l'apollinien et du dionysiaque.[…]

 La belle apparence des mondes du rêve, que tout homme sait créer en artiste accompli, est le fondement de tous les arts plastiques, comme aussi, nous allons le voir, d'une large moitié de la poésie. Nous éprouvons une jouissance à comprendre directement les formes ; toutes nous parlent ; nous n'y trouvons rien d'indifférent ni de superflu. Pourtant, même quand cette réalité de rêve atteint sa perfection, nous éprouvons le sentiment confus qu'elle est apparence. […] Un esprit philosophique a même le pressentiment que, sous la réalité où nous vivons, il en existe une autre, cachée, et donc que notre réalité aussi est une apparence. Schopenhauer n'hésite pas à désigner cette faculté de voir quelquefois dans les êtres et les choses autant de fantômes et de mirages, comme la marque propre de l'esprit philosophiquec. Or, l'homme doué de sens artistique se comporte à l'égard de la réalité du rêve comme le philosophe à l'égard de la réalité de l'existence. II se plaît à la considérer, et à la considérer exactement : ces images lui servent à interpréter la vie, à travers ces événements il se prépare à la vie. Il n'éprouve pas seulement la vérité des images agréables et radieuses ; les images graves, troubles, tristes ou sombres, les obstacles subis, les ironies du hasard, les attentes anxieuses, bref toute la « divine comédie » de l'existence, avec son Enfer, se déroule sous ses yeux, non pas comme un jeu d'ombres – car il participe à ces scènes – mais pas non plus sans que s'y mêle une fugace impression d'apparence.
Friedrich Nietzsche
La naissance de la tragédie, 1872, trad. C. Heim, Éditions Gonthier, 1964.

Aide à la lecture

a. Apollon est le dieu des arts et de la beauté. Il incarne la mesure, la raison, et la lumière qui réalisent l'harmonie et la belle forme. C'est le dieu de la civilisation.
b. Dionysos est le dieu qui symbolise la démesure et les désirs inconscients. C'est le dieu de la nuit et des profondeurs primitives, en accord avec la nature. Il trouve une place privilégiée dans le culte de l'orphisme.
c. Schopenhauer déclare dans Le monde comme volonté et comme représentation : « La vie et les rêves sont les feuillets d'un livre unique : la lecture suivie de ces pages est ce qu'on nomme la vie réelle. »
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Doc.

Placeholder pour Salvador Dalí, L'énigme sans finSalvador Dalí, L'énigme sans fin
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Salvador Dalí, L'énigme sans fin, 1938, huile sur toile, 114,5 cm × 146,5 cm (musée national centre d'art Reina Sofía, Madrid).
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Question

Dans quelle mesure peut‑on rapprocher l'analyse de Nietzsche de celle de Freud sur le conscient et l'inconscient ?
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Texte 12
L'art et la magie

L'art est le dernier domaine dans lequel l'homme peut exercer l'énergie primitive que la société lui demande de freiner pour se socialiser.

 L'art est le seul domaine où la toute-puissance des idées se soit maintenue jusqu'à nos jours. Dans l'art seulement il arrive encore qu'un homme, tourmenté par des désirs, fasse quelque chose qui ressemble à une satisfaction ; et, grâce à l'illusion artistique, ce jeu produit les mêmes effets affectifs que s'il s'agissait de quelque chose de réel. C'est avec raison qu'on parle de la magie de l'art et qu'on compare l'artiste à un magicien. Mais cette comparaison est peut-être encore plus significative qu'elle le paraît. L'art, qui n'a certainement pas débuté en tant que « l'art pour l'art », se trouvait au début au service de tendances qui sont aujourd'hui éteintes pour la plupart. Il est permis de supposer que parmi ces tendances se trouvaient bon nombre d'intentions magiques.
Sigmund Freud
Totem et tabou, 1912, trad. S. Jankélévitch, © Payot, 1923.
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Placeholder pour Sigmund FreudSigmund Freud
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Freud - XXe siècle

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Que l'auteur déclare-t-il ?





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Question

Les pulsions sont‑elles suffisantes à justifier l'élan créateur de l'homme ?
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