Il s'agit de deux niveaux différents dans la considération de la réalité. Ce qui est abstrait relève d'une séparation opérée par l'intelligence des qualités des êtres, considérées pour elles‑mêmes, universellement et hors de tout objet singulier, comme la grandeur, la liberté ou la couleur jaune. Ce qui est
concret est ce dont l'existence est constatable et connaissable par l'expérience sensible. Cela concerne donc les objets singuliers, tels qu'un homme, une action ou un paysage.
La connaissance abstraite procède pour l'essentiel de la perception concrète, et donc lui succède. Par exemple, l'enfant perçoit d'abord deux bonbons, deux voitures, deux carottes, puis finira par accéder à l'idée du nombre deux. Les réalités mathématiques sont des notions abstraites.
En art, le préjugé réaliste veut que les arts plastiques (peinture, sculpture) représentent la réalité concrète. À partir de 1910, les artistes s'affranchissent de cette contrainte. Ils revendiquent la même liberté que les musiciens qui ne représentent rien mais composent avec des éléments sonores. La peinture va s'éloigner progressivement des modèles, dans les couleurs – ce qui donnera naissance au fauvisme – comme dans les formes – ce dont témoigne le cubisme. Le XXe siècle verra se développer de grandes oeuvres abstraites : Paul Klee, Vassily Kandinsky, Kasimir Malevitch, Mark Rothko, etc. On parle d'art abstrait et d'art figuratif.