La sixième confusion consiste à dire que le pragmatiste « n'explique pas ce qu'est la vérité, mais seulement comment on y parvient ». Ici, c'est très simple : en expliquant
comment on parvient à la vérité, le pragmatiste nous dit en même temps ce qu'elle est. Si quelqu'un nous indique comment nous rendre à une station de chemin de fer, dans le même temps il nous indique ce qu'elle est (le
quid). Il en est de même pour la vérité. La vérité est donc définie par le chemin qui y mène : « Pour le pragmatiste, au contraire [contrairement à ses adversaires] , toute vérité désincarnée est statique, impuissante et relativement fantomatique, la vérité complète étant celle qui déploie de l'énergie et qui livre bataille. »
La septième confusion réside dans la croyance que le pragmatisme ignore tout besoin théorique. Ce reproche tient à un usage trop commun des mots. Le pragmatisme dit bien qu'il tient à une définition « pratique » de la vérité, mais il convient de ne pas opposer pratique et théorique. Par ailleurs, « pratique » ne signifie pas non plus que la vérité soit à l'avantage exclusif d'un individu. Le pragmatisme compare des idées candidates à la vérité en utilisant des opérations théoriques : « analyse, déduction, comparaison, etc. »
La huitième confusion concerne l'idée que le pragmatiste est enfermé dans
le solipsisme1 : la pensée entre en « contact » avec la réalité par les processus de vérification. Le pragmatisme n'est donc pas un solipsisme. Si l'interprétation « humaniste » du pragmatisme est compatible avec l'hypothèse solipsiste, le pragmatiste n'est pour autant pas réduit à ce dernier.
Note de bas de page
1. Le solipsisme désigne la théorie selon laquelle seul le sujet a une réalité.