« Comment agir ? Avec qui ? La réponse est simple. Partout où un lien
s'est rompu, et avec tous ceux qui s'en indignent. Que chacun entreprenne
donc de lutter là où il est, dans chaque quartier, chaque commune, chaque
association ou milieu professionnel, chaque pays, chaque culture.
Sans eau, sans terre, sans lumière.
Tout ce qui nous relie nous rend plus forts. C'est une évidence pour
tout le monde. Qui n'est pas convaincu d'avance, en effet, que « créer du
lien » est une bonne chose ? Et puis, qui n'est pas persuadé aussi d'avoir
déjà tous les liens – famille, amis, etc. – dont il a besoin ? On pourrait
donc me rétorquer que les Tisserands enfoncent des portes ouvertes ! Mais
combien de nos liens nous nourrissent vraiment ? Combien nous inspirent
et élèvent notre niveau de conscience ? Et d'autre part, quand on veut
passer à l'action, c'est-à-dire travailler effectivement à raccommoder le
tissu déchiré du monde, par où commence-t-on ? Il ne suffit donc pas de
la conviction théorique qu'« il faut recréer du lien ». Ici comme ailleurs se
pose le problème du passage à l'action. Comment recréer concrètement du
lien ? Comment faire converger aussi une multitude d'initiatives isolées,
qui vont dans ce sens, pour leur donner la puissance d'une mobilisation
collective ? Mais pour passer à l'action, il faut surmonter la difficulté que
représente la compréhension de ce qu'est un lien nourricier, une vie bien
reliée, une civilisation du lien.
Le Triple Lien, à soi, à autrui et à la nature, est nourricier parce que sans
lui notre ego et notre humanité se dessèchent et dépérissent comme une
plante laissée trop longtemps sans eau, sans terre, sans lumière :
1. Le lien à soi : notre « petit moi » se rabougrit si nous vivons sans lien
intérieur avec notre « moi des profondeurs », qui est la source ou ressource
de vitalité, d'inspiration, de sagesse et d'amour au cœur de nous-mêmes,
mais dont nous sommes spontanément inconscients. […]
2. Notre petit moi se rétrécit un peu plus si nous négligeons notre lien
social, qui est sa deuxième source / ressource de vitalité. […]
3. Notre petit moi finit enfin de s'amoindrir et
de mourir à petit feu s'il subit l'asphyxie d'une
existence urbaine sans contact suffisant avec
l'oxygène physique et spirituel de la nature.