Des dizaines de start-up fleurissent sur le créneau très porteur de la viande cellulaire, surfant sur la vague du bien-être animal.
Bonne nouvelle pour les poulets. Cet été, la chaîne de restauration KFC a annoncé qu'elle allait mitonner des nuggets in vitro. Sa recette consiste à faire croître dans un bioréacteur un échantillon de cellules prélevées sur une volaille. Au bout de quelques semaines, le géant du fast-food récupère la bidoche artificielle pour l'enrober d'une chapelure maison, agrémentée de diverses épices. Le début de la fin pour les abattoirs ?
Alors que nos éleveurs sont tout à la fois accusés de polluer la planète et de se comporter comme d'implacables tortionnaires envers les bestiaux, cette alternative compte déjà ses supporters chez les défenseurs des causes animale et écolo. La viande cultivée préserverait les terres agricoles, consommerait moins d'eau et produirait moins de gaz à effet de serre.
Les pionniers de la barbaque1 aseptisée2 devront d'abord réduire leurs coûts. Le prix de revient du kilo de viande cellulaire serait aujourd'hui de l'ordre du millier d'euros. Le déploiement des premières usines pilotes de Mosa Meat et Memphis Meats laisse penser qu'une production de masse pourrait bientôt démarrer, et faire rapidement baisser ces tarifs.
Cette nouvelle industrie sera-t-elle vraiment moins nocive pour l'environnement que l'élevage ? Surtout, cette viande 3.0 sera-t-elle bonne pour notre santé ? "Il reste beaucoup d'inconnues, résume Marie-Pierre Ellies-Oury, chercheuse associée à l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae). Si les producteurs parviennent à maîtriser la composition nutritionnelle de leur viande, par exemple en privilégiant de bons acides gras, cela pourrait s'avérer bénéfique. Mais on ne connaît même pas notre capacité à digérer cette nourriture."
En attendant, les gardiens de la gastronomie française ont déjà déterré le hachoir de guerre. "Non à la viande de laboratoire issue de cellules souches !" clament dans leur pétition les chefs cuisiniers de l'association Euro-Toques, remontés au point de porter le dossier à la Commission européenne. Les prochains débats risquent d'être saignants.