LA FEMME. – S'il en est ainsi, fais comme les autres.
NAHOUBOU. – Quels autres ?
LA FEMME. – Les autres, tous les autres, mon ami.
NAHOUBOU. – Faire comme les hommes de Macadou ?
LA FEMME. – Comme tous les autres qu'on voit se pavaner par les rues à ne rien faire mais à s'enrichir on ne sait comment. Sont-ils plus intelligents que toi ? Non ! Ils savent tout simplement exploiter leurs amitiés, se faire accepter, se mettre au-dessus des lois, tandis que toi tu restes dans ton coin, décidé à payer toutes les taxes du monde, à supporter les affronts de n'importe qui... Secoue-toi un peu... Montre les dents, les griffes, tout...
NAHOUBOU. – Tout ? Faire comme les autres ? (Il veut s'asseoir).
LA FEMME. – Lève-toi mon ami, lève-toi. Il y en a qui ne sont pas Macadou, mais qui, en fait, sont plus macadous que les macadous. Il y a ceux que les macadous protègent, ceux que les macadous maintiennent ; entre dans la catégorie que tu veux. Fais quelque chose ; sois quelqu'un et non plus le dernier des derniers.
NAHOUBOU. – Faire quoi ?
LA FEMME. – Quelque chose, débrouille-toi, montre que tu as des dents, des griffes, des crocs comme tout le monde.
NAHOUBOU. – N'est-ce pas trop me demander ? On m'a appris à pêcher et à cultiver. Comment puis-je faire comme les autres ? C'est si difficile.
LA FEMME. – Mais si facile d'être le dernier des derniers, de se laisser marcher sur les pieds, sur la tête, de se laisser piétiner, de se relever et de crier. Merci ! Non ! J'en ai assez. L'existence est devenue un enfer...Un enfer dans ta maison... (Elle fait mine de partir). [...]
NAHOUBOU. – Il y a des choses interdites.
LA FEMME. – Les interdits ! Les interdits, c'est ce qu'ils se permettent tous. Les interdits. Quel naïf !