Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, Mesdames et Messieurs les jurés, en cet instant où je prends la parole pour Christian Ranucci, j'ai dans cette enceinte de justice face à moi trois adversaires. Vous, Maître Collard, qui avez su avec une belle humanité prêter votre voix aux parents de la petite Maria-Dolorès ; vous, Monsieur l'avocat général qui avez prononcé l'un des meilleurs réquisitoires2 que j'aie eu à entendre de toute ma carrière ; mais mon plus redoutable adversaire, c'est vous-même, Ranucci ! Vous qui êtes incapable d'inspirer la sympathie aux autres avec vos yeux de poisson mort ! [...]
Mais, Mesdames et Messieurs les jurés, ne vous fiez pas aux apparences. [...]
N'écoutez pas non plus la rumeur ignoble. N'écoutez pas l'opinion publique qui frappe à la porte de cette salle. Elle est une prostituée qui tire le juge par la manche, il faut la chasser de nos prétoires3, car, lorsqu'elle entre par une porte, la justice sort par l'autre. Je n'ai rien à faire de l'opinion publique. Je ne suis pas un signataire de pétitions humanitaires. Je ne suis pas un militant. Je suis un homme. Et en tant que tel, je hais la peine de mort. Je ne serai jamais aux côtés de ceux qui la réclament, de ceux qui la donnent, jamais je ne serai aux côtés du guillotineur. [...]
En donnant la mort à Ranucci, vous rouvririez les portes de la barbarie, vous grossiriez le tombereau sanglant des erreurs judiciaires, vous deviendriez bourreau, vous céderiez à la colère, à la peur, à la panique. Mais je le sais : vous ne ferez pas cela !
Non, vous ne ferez pas cela, car Christian Ranucci est innocent du crime dont il est accusé. Je plaide non coupable.
Introduction.
Discours de l'accusation prononcé par le procureur ou l'avocat général.
Salles d'audience du tribunal.